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Bien que nous fussions au 4 octobre, la chaleur et la poussière ont rendu le voyage assez pénible, d’autant que la route était sillonnée d’innombrables voitures de poste, de diligences et de fiacres.

A la première poste, nous nous sommes rencontrés avec le duc de Frias, ambassadeur d’Espagne. Il avait quitté Paris une heure avant nous ; mais, une roue de sa voiture s’étant cassée, il avait dû attendre qu’elle fût réparée. A la seconde poste, nous avons trouvé la princesse de Wagram dans une voiture de voyage d’un rouge clair, avec son chiffre d’une grandeur peu commune, surmonté d’une couronne royale, à laquelle elle tient infiniment et à laquelle elle a droit comme princesse de Bavière.

Il était deux heures à peu près lorsque nous arrivâmes à l’entrée de la belle forêt de Fontainebleau. Comme nous venions d’y pénétrer, toute la cavalcade des Ducs d’Aumale et de Montpensier, composée des aides de camp des deux princes, de ceux du Roi et de quelques étrangers, en tout cinquante personnes environ, se trouva sur notre chemin. Grandes salutations de part et d’autre, et puis, chacun poursuit sa route. Peu de temps après, apparurent neuf voitures à six chevaux. Dans la première voiture de chasse à baldaquin se trouvaient le Roi, lord Granville à sa droite et le maréchal Gérard ; dans la seconde, un grand char à bancs recouvert aussi d’un baldaquin, étaient assises sur la première banquette la Reine, Madame Adélaïde et lady Granville et derrière, Mme Thiers, les maréchales de Trévise et Gérard, Mme de Montalivet, Mme de Laborde, Mme de Lobau, etc., et enfin les dames d’honneur. La troisième voiture, encore un char à bancs pareil à celui de la Reine, ressemblait à une grande corbeille de fleurs. Les deux princesses occupaient la première banquette. Les autres étaient occupées par une infinité de jolies jeunes femmes et de jeunes personnes telles que Mlles de Laborde, de Chanterac, de Lobau, de Chabot, Mortier. Leurs belles et élégantes toilettes, leur figure si fraîche, si gaie ayant pour fond de tableau cette superbe forêt, ces beaux arbres avec leur verdure foncée sur laquelle tous ces chapeaux blancs, ces rubans roses, ces robes blanches se détachaient si admirablement, tout cela précédé et suivi de nombreux équipages de piqueurs, de palefreniers en grande livrée, produisait un ravissant effet et nous disposait d’avance très favorablement au séjour de Fontainebleau.