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vous vous trouvez, à l’heure qu’il est, chargé, de la part de Charles X et de la part de Mme la Duchesse de Berry, de veiller aux progrès du parti de Henri V en France et de donner aux affaires de ce parti la direction la plus avantageuse, afin d’effectuer le retour de ce jeune prince dans sa patrie et de le rétablir dans ses droits par la grâce de Dieu.

— C’est vrai, c’est vrai, lui répondit M. de Chateaubriand.

Et la conversation en resta là.


8 mai. — Hier soir, il était question chez nous des progrès que fait le magnétisme et des résultats inconcevables qu’on en obtient. Le duc de Laval nia tout ce qu’on disait là-dessus et soutint qu’il n’en était rien.

— Il y a deux ans que je pensais exactement comme M. le duc, observa M. de Balzac qui était là ; il m’aurait fallu toutes sortes de preuves évidentes pour me résoudre à croire à une chose dont on voit les résultats sans qu’il soit humainement possible de les expliquer. Je me trouvais à la campagne, avec quelques-uns de mes amis. Le soir, on parla de magnétisme, ainsi que nous en parlons en ce moment. Je m’énonçai contre, dans le même sens que M. le duc. Il se trouvait parmi nous un médecin qui soutint avec force que le pouvoir du magnétisme existait réellement et qu’il ne tenait qu’à moi ou à une autre personne de bonne volonté de lui donner le moyen de prouver la vérité de son assertion. Une des dames qui se trouvaient comme nous en visite dans ce château fut déclarée par lui comme très sensible au magnétisme. Il fallut quelque temps et mille promesses et assurances de notre part et de son amie, la maîtresse de maison, avant que cette dame consentit à se prêter à cette expérience. Le médecin commença donc à la magnétiser ; il ne lui fallut que quelques minutes pour l’endormir. Elle répondit alors à toutes nos questions exactement comme si elle était éveillée ; elle nous reconnut sans ouvrir les yeux, elle annonça toutes les cartes que je lui présentais. Cela ne me suffisait pas ; je voulus que la voyante me dît des choses qu’elle n’aurait pu nous dire dans son état naturel. Je tirai donc cinq cartes au hasard, sans les regarder ni les montrer à personne ; je les mis dans ma poche, puis je demandai à la somnambule quelles cartes j’avais. Sans trop hésiter, elle me les nomma toutes. J’allai ensuite dans la chambre voisine, je tirai une carte après l’autre