Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 15.djvu/625

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les amis du gouvernement sont enchantés de la leçon que viennent de recevoir les députés républicains et il espère, non sans fondement, il me semble, qu’une autre fois, ces messieurs s’énonceront avec plus de mesure dans la Chambre. Bien des personnes croient qu’à l’occasion de l’enterrement de Dulong, il y aura du train ; je ne le pense pas ; le parti républicain n’est pas assez fort pour lutter à main armée contre le gouvernement.


31 janvier. — L’enterrement de Dulong s’est passé très tranquillement, grâce aux 30 000 hommes de troupes sous les armes et les canons braqués de tous les côtés. La lettre que Carrel a adressée à M. de Rumigny, en réponse à la sienne publiée dans les Débats, est épouvantable. Personne ne doute qu’elle aura pour suite un nouveau duel entre Carrel et le général de Rumigny. Mais ce dernier a quitté Paris pour se rendre aux élections dans le Maine. Le gouvernement espère qu’à son retour, tout sera oublié. En attendant, on rejette publiquement tout le blâme sur l’aide du camp du Roi ; les journaux du gouvernement disent que M. de Rumigny avait oublié son devoir ; qu’étant de semaine aux Tuileries, il n’aurait jamais dû accepter d’être témoin, les devoirs de son service lui défendant de quitter le château. On lui reproche encore d’avoir reçu aux Tuileries les autres témoins, d’avoir discuté là les conditions du duel, ce qui a pour effet de compromettre le Roi.


24 février. — Hier, dans les rues de Paris, la police a rossé tout le monde, tout ce qui lui tombait sous sa main. Les mouchards s’étant mis dans la foule, faisaient des croix avec de la craie blanche sur les habits de tous les crieurs ; et les sergens de ville, qui en étaient instruits, poursuivaient ceux-ci en les rossant d’importance. Les sergens, la police, la troupe une fois lancée y ont pris goût, à ce qu’il parait, et voilà qu’on battait, qu’on assommait des femmes et des enfans ; c’est jusqu’à l’apothicaire du château qui, malgré ses protestations, a été tellement meurtri de coups qu’il est au lit pour plusieurs semaines.

Cependant, le peuple souverain avait déjà enfoncé la boutique d’un armurier sous le théâtre de l’Ambigu-Comique et se disposait à s’emparer des armes, lorsque la garde municipale est venue et l’a empêché de continuer. Le mannequin dont