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le vieil axiome : primo vivere, deinde philosophari, et a dit sans ambages que, pour faire resplendir le génie français, il fallait d’abord défendre le sol français. On sait à quel point nous sommes de cet avis : les deux choses d’ailleurs ne sont pas inconciliables et on trouvera certainement, dans la pratique, les moyens de les concilier. On croirait vraiment qu’une année de plus à passer sous les drapeaux est la ruine fatale des hautes études : mais d’abord, s’agit-il vraiment de trois années pour tous ? Égalité, oui ; uniformité absolue, non. La Commission a admis, sous forme de congés, des tempéramens en faveur des jeunes gens qui auront obtenu le brevet d’aptitude militaire. Et enfin, nous le répétons, on fera pour le mieux en vue de faciliter leurs études aux élèves de l’enseignement supérieur.

La Commission de l’armée n’a pas paru, au premier moment, mettre un grand empressement à reprendre et à poursuivre ses travaux ; cependant il est juste de reconnaître qu’elle a regagné le temps perdu et, en peu de jours, fait une besogne utile. Elle a travaillé, non pas sur le projet du gouvernement, mais sur le contre-projet présenté par ses deux vice-présidens, MM. Adrien de Montebello et Joseph Reinach. Hâtons-nous de dire que, non seulement il n’y a pas de contradiction entre les deux projets, mais qu’en réalité, ils n’en font qu’un. MM. de Montebello et Reinach se sont contentés de simplifier celui du gouvernement et de le présenter sous une forme qui supprime certaines objections. S’il n’y a pas assez d’hommes, disait-on, avec le service de deux ans,-il y en a trop avec celui de trois. Est-ce aussi sûr qu’on le prétend, nous en doutons. La pénurie actuelle du contingent oblige les conseils de révision à prendre de véritables non-valeurs militaires, des hommes dangereux pour leurs camarades dans les chambrées et qui peuplent les hôpitaux. Les déchets annuels en sont grossis. Quand on ne prendra vraiment que les hommes valides, on en aura peut-être moins qu’on ne l’imagine. Admettons toutefois qu’il y en ait en excès. C’est ce qu’ont fait MM. de Montebello et Reinach et, renversant les termes du problème : — Ce qu’on cherche, ont-ils dit, c’est la fixité des effectifs. Commençons donc par fixer, d’après les indications du ministère de la Guerre, le nombre d’hommes nécessaires dans nos compagnies, nos escadrons, nos régimens. Ce chiffre devra rester immuable, il devra toujours être au plein. Alors, s’il y a des hommes de trop, on les libérera au moyen de congés où la faveur ne pourra jouer aucun rôle, parce qu’ils résulteront de circonstances matérielles et du chiffre obtenu au tirage au sort. — Tel est le système réduit à ses