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les Pyrénées et les Alpes. Aux Pyrénées, c’est Jean de Vogüé qui, en 1503, sous le maréchal de Rieux, contribue à la conquête du Roussillon. Et au delà des Alpes où toute la noblesse française paie le tribut du sang, deux Vogüé, ses frères, Louis et Blaise, connaissent les grandes aventures ; belles batailles où Bayard se distingue, chevauchées sur les grandes routes ensoleillées, réceptions délicieuses dans les villes blanches, tous les épisodes de ces merveilleuses et funestes guerres d’Italie, les Vogüé sans doute les vécurent. Louis y resta, tué, dit l’épitaphe de son tombeau, in exercitu belli ultra montes, probablement dans cette glorieuse journée de Marignan qui, un instant, mit en Italie et dans la Chrétienté la France au pinacle.

Mais c’est lorsque François Ier et Charles-Quint s’affrontent qu’aucun Français bien né ne peut rester enfermé dans sa maison, La lutte n’est point, quoi qu’on ait dit, entre deux princes jaloux ; il s’agit, pour la France, de garder son rang dans le monde que tend à absorber la maison rivale. François Ier appelle en 1532 « le ban et l’arrière-ban : » Jean laisse là ses onze enfans, presque tous mineurs, pour courir se mettre au service du Roi, en Piémont, et ne revient s’asseoir au foyer de Vogüé que lorsque le Roi et le pays le permettent.

Désormais, il y aura presque toujours un, deux, trois Vogüé dans nos armées. L’épée ne reste plus au croc. Aux ennemis du dehors va se joindre derechef l’ennemi de l’intérieur.


Ce fut encore une période horriblement critique de notre histoire que celle qui vit l’effroyable tourmente des guerres de religion. La France, dès la première moitié du XVIe siècle, se coupa en deux. Et pas une province n’échappa à la guerre civile.

Un Vogüé, traditionnellement, en de telles occurrences se dit : « Où est la France ? » En ces siècles encore, la France était avec le Roi. Les Vogüé se rangèrent du côté catholique, qui était le côté du Roi.

Lorsque la tourmente se déchaîna, le Midi (l’Albigeois est toujours debout) fut, plus qu’aucune province, emporté dans le cyclone : le Vivarais fut comme submergé. De Paris aucun secours n’était à attendre. La guerre civile se déchaînait dans vingt provinces, cent cantons et mille bourgs, et c’était sur place qu’il fallait résister.