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Pères ou docteurs, qui ont, sur la pierre angulaire de l’Evangile, élevé peu à peu l’édifice de la tradition.

Paul, Irénée, Cyprien, Origène, Jérôme, Ambroise, Augustin, Chrysostome, Grégoire le Grand, Thomas, longue suite des ouvriers qui tour à tour, à leur heure, ont construit la doctrine chrétienne. « — Ce sont des hommes, dites-vous, et ils se trompent... » — Cela, nous, humanistes, nous l’avions dit. Aussi bien, ne s’agit-il point d’étouffer sous l’autorité exclusive de chacun, quels que soient la sainteté et le génie, les droits de la pensée et de la liberté individuelle. Mais nous ne cherchons point la vérité dans un seul, elle est dans ce qui est commun à tous ; non dans leurs opinions propres et parfois contraires, mais dans leur accord : et pour tout dire, en ce par quoi ils se confirment les uns les autres, se relient les uns aux autres, moins dans une inspiration isolée, que dans ces inspirations accumulées. Le consentement général, voilà l’assise ferme de notre certitude. Le progrès doctrinal se fait de toutes ces découvertes qui s’enchaînent, comme les terres d’un même pays que le voyageur découvre dans sa course. Et quand le consentement des docteurs crée à son tour le consentement des fidèles, la croyance raisonnée, la croyance générale, la tradition vaut la valeur d’une révélation. Elle fonde, en la perpétuant, en l’élargissant, l’unité du dogme sur l’unité du Christ.

Cette autorité doctrinale nous suffit-elle encore ? Et s’il est vrai que l’Église soit une société, comment n’appelle-t-elle point une dernière forme plus concrète encore et plus visible de l’unité, qui est un gouvernement ?

Ce gouvernement, c’est le sacerdoce. On peut discuter sur l’étendue de ses droits et critiquer l’exercice de son pouvoir : on n’en saurait contester l’institution. Le Christ a choisi ses apôtres, comme les apôtres ont choisi leurs successeurs. Ainsi le sacerdoce est né avec l’Église et a grandi avec elle ; dès le début, les chefs de la communauté chrétienne exercent les fonctions qui se préciseront plus tard. Ils enseignent et ils prêchent ; ils confèrent le baptême et imposent les mains ; ils consacrent, ils surveillent, ils administrent ; et déjà, dans saint Paul, se peuvent discerner les premières constitutions ecclésiastiques. Sous ces formes diverses, à l’origine, se constitue l’autorité. Et pareillement encore, hiérarchie, conciles, primauté sont en germe dans ces pouvoirs primitifs. Autorité inspirée. Car si l’inspiration