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Hilaire, saint Jérôme, saint Chrysostome. « Tout autre ouvrage, avait dit l’auteur, n’est qu’un jeu à côté de celui-là. » Ces notes rédigées, il songe encore à un commentaire sur l’Épitre aux Romains, le cinquième évangile du luthéranisme. Et enfin, le Nouveau Testament « restitué » pour les théologiens, il va l’expliquer à l’élite. Une exposition simple et claire, en langue polie, mettant en saillie les doctrines fondamentales, les enseignemens ou les faits, tel est le travail qu’il entreprend, à l’usage des gens du monde ou des gens de lettres. En 1518, il commence les Paraphrases, celles sur les Epîtres de saint Paul ; en 1521, à la demande du cardinal de Sion, celles sur les Évangiles ; en 1524, celles des Actes qu’il dédiera à Clément VII. Œuvre capitale, dans la théologie érasmienne, puisque nous y trouverons presque toutes ses idées sur la nature et la valeur du christianisme, le problème moral, les justifications, la grâce et le péché.

Voilà donc, sous une double forme, l’Evangile « retrouvé. » Et après la Bible, les Pères. — En 1519, Érasme avait publié Saint Cyprien : en 1522, il édite Saint Hilaire, les Commentaires d’Arnobe sur les Psaumes. En 1525, sont traduits quelques Traités de saint Chrysostome « qu’il serait très opportun de faire connaître tout entier. » En 1527, paraît Saint Ambroise ; en 1528, Saint irénée ; en 1529, Lactance, et, dans ces mêmes années, le prodigieux érudit révise, annote, publie Saint Augustin. Mais son œuvre préférée est encore Saint Jérôme. On peut dire qu’il passa presque toute sa vie à lire, à étudier, à faire revivre celui qui fut son maître. Il avait entrepris, dès 1516, la publication de ses Lettres ; il y revient, en 1521, puis, en 1524, et, l’année suivante, c’est l’œuvre intégrale qu’il donne. « J’y ai restitué une foule de choses qui m’avaient échappé, » écrit-il à Egnatius. — Ce grand travail d’éditions absorba Érasme jusqu’à sa fin. Malade, infirme, chassé de Bâle par la Réforme, il trouva encore la force de publier, en 1532, Saint Basile ; cinq ans plus tôt, il avait commencé à réunir les fragmens d’Origène. Il eut cette dernière joie de les voir imprimer avant que la mort ne fit tomber la plume de ses mains.

Ainsi, en moins de vingt ans, c’est toute l’antiquité chrétienne rendue à la lumière. Labeur sans égal, dont on reste confondu et qui reste le meilleur, sans doute, de la gloire d’Érasme. Qu’apportait-il ? Peu de chose en apparence. Des