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SAINT AUGUSTIN[1]

QUATRIÈME PARTIE[2]

LA VIE CACHÉE


« Fac me, Pater, quærere te ! Fais, ô mon Père, que je te cherche ! »
( Soliloques, I, I)


I. — LE DERNIER SOURIRE DE LA MUSE

Enfin touché par la grâce, Augustin allait-il décidément se convertir avec éclat comme son confrère, l’illustre Victorinus ?

Il n’ignorait pas que ces conversions retentissantes ont une vertu exemplaire qui entraine les foules. Et, si « contrit et humilié » que fût son cœur, il savait bien qu’il était, dans Milan, un personnage considérable. Quel bruit, s’il donnait sa démission de professeur de rhétorique, pour vivre selon l’ascétisme chrétien !... Mais il préféra éviter à la fois le scandale des uns et la louange tapageuse des autres. Dieu seul et quelques amis très chers seraient témoins de sa pénitence.

Vingt jours à peine le séparaient des vacances. Il patienterait jusque-là. Ainsi, les parens de ses élèves ne pourraient l’accuser de les avoir abandonnés avant la fin de l’année scolaire, et, comme l’état de sa santé s’aggravait, il aurait une excuse valable pour se démettre de ses fonctions. L’humidité du climat lui

  1. Copyright by Louis Bertrand, 1913.
  2. Voyez la Revue du 1er et 15 avril et du 1er mai.