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REVUE LITTÉRAIRE

LE ROMAN ET L’HISTOIRE

MM. Jérôme et Jean Tharaud viennent de publier La tragédie de Ravaillac[1]. Ils n’ont pas, sous le titre de l’ouvrage, inscrit ces deux mots : roman historique ; — et ils ont bien fait. Non que La tragédie de Ravaillac ne soit pas un roman historique : elle en est un, et à merveille ; mais on a compromis ce genre de telle sorte qu’aujourd’hui son étiquette est scandaleuse.

La vérité de l’histoire et la liberté du roman, voilà deux choses qui ne se réunissent pas sans difficulté. Or, les romantiques avaient également la passion de l’histoire et le don presque monstrueux de l’inexactitude. A propos d’un drame d’Alexandre Dumas le père, M. Henry Bidou notait, il n’y a pas longtemps, ce qu’a de ridicule et d’abominable même l’immense caricature de la France et de son passé composée, avec un frivole acharnement, par le plus fécond de nos écrivains. Le plus fécond et le plus abondamment populaire. Ainsi, une absurde image de nos grands siècles est, par lui, répandue à profusion dans les esprits. Il le faisait avec une espèce de bizarre innocence ; et il ne s’était aucunement promis de transformer nos rois en des fantoches libidineux, le Louvre en un lieu mauvais, comme s’il secondait une

  1. La Tragédie de Ravaillac (chez Émile-Paul). Des mêmes auteurs, les Frères ennemis (Cahiers de la quinzaine, 1906) ; — Dingley, l’illustre écrivain (Edouard Pelletan, 1906 ; nouvelle édition chez Émile-Paul, 1911) ; — Bar-Cochebas (Cahiers de la quinzaine, 1907) ; — la Ville el les champs : l’Ami de l’ordre et les Hobereaux (Edouard Pelletan, 1907) ; — la Maîtresse servante (Émile-Paul, 1911) ; — Hommage au général Charette (Champion, 1912) ; — la Fête arabe (Émile-Paul 1912).