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moment, la ville fut au pouvoir des insurgés et, pour la leur reprendre, on a dû sacrifier beaucoup d’hommes. De leur côté, ils doivent avoir perdu immensément de monde, car on les a chargés à la baïonnette et mitraillés. Jamais bataille ne fut plus acharnée, plus sanglante ; on ne connaît pas encore le nombre des victimes, mais on l’évalue au moins à 6 000, sans compter les blessés.

Les nouvelles arrivées hier soir nous disent que les troupes ont été obligées d’abandonner le fort de Montessuy, construit depuis la révolution de Juillet pour se défendre contre une attaque des puissances alliées.

Carlistes et républicains sont sur le qui-vive. Déjà on a fait beaucoup d’arrestations à Paris, bien que plusieurs des chefs aient pu s’enfuir. Toutefois, avant-hier, on a coffré Lennox au moment où il voulait se rendre à Lyon. Un ennemi plus dangereux, plus entreprenant, qui réunit du talent à son courage, leur a échappé ; c’est le général Dubourg, républicain par conviction autant que par haine pour ce gouvernement qui l’a destitué à la suite des troubles de Février. Ce général est entre Lyon et Marseille, dit-on, pour soulever cette dernière ville et achever l’alliance entre les carlistes et les républicains. S’il y parvient, tout le Midi et la Vendée sont en feu ; Mme la Duchesse de Berry n’a qu’à débarquer à Marseille, et Bourmont est à ses ordres pour commander l’armée.


30 novembre. — Les amis des Tuileries regrettent qu’on ait envoyé le Duc d’Orléans contre les Lyonnais. On aurait dû, disent-ils, le faire paraître dans cette ville comme l’ange du pardon. Voilà le rôle qu’il devait jouer. Le maréchal Soult aurait dû frapper et d’Orléans pardonner.

Le choléra ne fait ici aucune espèce d’impression. On en parle comme de la grippe ou de la coqueluche. On en a tant parlé que c’est comme l’enfant de la fable qui criait au loup.


COMTE RODOLPHE APPONYI.