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Son représentant à Paris, M. Le Hon, est allé trois fois chez le Roi aujourd’hui ; c’est que le temps presse ; si les troupes n’arrivent point, son gouvernement et son roi se trouvent chassés de Bruxelles. L’ambassadeur de Russie, qui aurait dû partir pour l’Angleterre, reste ; d’abord il ne pourrait s’absenter maintenant de Paris, et puis il n’a plus rien à craindre des émeutes ; celle qui aurait dû avoir lieu devant son hôtel ne se fera pas plus que celles du Palais-Royal. Le général Fagel, ministre de Hollande, est au désespoir de tout ce qui vient d’arriver ; il trouve que son maître a été mal conseillé et que cette déclaration de guerre à toute l’Europe ressemblait furieusement à un coup de tête.

Le Duc d’Orléans a été fait général ; sa brigade est composée du 1er régiment de hussards appelé de Chartres et du 1er de lanciers, dont le Duc de Nemours est colonel. Le commandement de la cavalerie légère est confié au général de Lawœstine et au Duc d’Orléans ; deux de ses aides de camp, les généraux de Marbot et Baudrand, l’ont accompagné.

La position dans laquelle se trouve en ce moment la ville d’Anvers, fait pitié. Cette ville est menacée de se voir d’un moment à l’autre incendiée, dévastée. Nous vivons dans un siècle où les événemens se pressent tellement qu’à peine on a le temps de les coucher sur le papier pour les transmettre à la postérité.


20 août. — Les jours qui précédèrent le 4 août où nous est arrivée la nouvelle de la guerre entre les rois des Pays-Bas et de Belgique, Paris fut encore une fois le théâtre d’émeutes et de troubles. Casimir Perier ne voulait plus rester, voyant qu’il avait perdu la confiance du Roi, et le parti républicain voulait profiter de cette occasion pour pousser ses chefs au Ministère ; mais, pour y parvenir, il fallait faire peur au Roi. A cet effet, on rassembla de la canaille sous ses croisées ; on la fit hurler et beugler. Le Roi se décida à prendre Odilon Barrot pour ministre ; il le lui offrit même, mais celui-ci eut peur à son tour de ne pas pouvoir conduire cette machine et refusa. Cette circonstance mit le comble à l’embarras du Palais-Royal. La guerre en Belgique, si populaire dans le parti républicain, est venue remédier à tout.

J’ai été présent à la dernière émeute ; on criait : Mort à Casimir Perier ; mort au Roi s’il ne change de ministère ! Je me