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affaire ; » voire celle des autres, de quelques autres, et fort distingués. Élève de MM. Fauré et Messager, ce n’est pas à ses maîtres qu’il fait le plus d’honneur : il se souvient surtout de Massenet, çà et là de Léo Delibes et, par hasard, de M. Gustave Charpentier. Au surplus, il est sage, prudent ; il ne brise, ne brusque, ne risque rien. Il chante, il est harmonieux. On voit tout de suite et toujours avec lui d’où l’on vient, où l’on va. Pas d’inquiétude, pas de surprise, encore moins de scandale. Cette musique est l’honnêteté même. Elle est aussi le bon sens et la clarté. Rien d’absurde, rien d’obscur et, par-dessus le marché, rien d’affreux. Mais savez-vous que voilà des riens qui, dans le temps où nous sommes, valent bien quelque chose ! Ajoutez qu’en plus d’un passage la parole est notée avec autant de sobriété que de justesse. On pourrait citer, entre tel et tel personnage, des bouts de dialogue où l’orchestre se mêle, de la façon la plus naturelle et la plus harmonieuse, à la voix qui chante et qui parle en même temps. Si nous avons bonne mémoire, on trouvait déjà dans Monna Vanna des détails de ce goût.

Oui, mais à côté de tout cela, ou plutôt par dessus et comme pour envelopper, noyer tout cela, quel flot de sensibilité, de sensiblerie doucereuse, un peu naïve, quand elle n’est pas larmoyante ! De même, écrivait à peu près M. Jules Lemaître un jour, qu’il y a des poètes et des poèmes qui font gnian-gnian et d’autres qui font boum-boum, il existe, dans l’un et l’autre genre, des musiciens et des opéras. Carmosine paraît le plus souvent appartenir à la première catégorie. Autrement dit, cette musique est de l’espèce romance. Elle garde partout quelque chose de superficiel et de mince. Rien ne lui manque-autant que la profondeur, si ce n’est le caractère et la nouveauté. Des moyens connus, de faciles effets lui suffisent. Elle parle avec une banale élégance, quelquefois avec des grâces minaudières, un trop coulant et trop fade langage. Inutile d’en étudier les élémens divers : la sage mélodie, l’orchestration correcte, la vérité d’expression tout extérieure. Le second acte entier, le meilleur peut-être, appartient au genre sentimental, mais sentimental à bon marché, l’étant par des procédés et dans un style vraiment trop dépourvu de distinction. Vulgaire alors ? Non pas : ordinaire plutôt, et, malgré cela, donnant dans certaines recherches, peu coûteuses aussi, et d’un goût fâcheux. Parmi « ces vains ornemens, » il n’en est pas de plus médiocre, et d’un tour plus affecté, que la terminaison de la phrase mélodique sur une note haute, généralement prise en douceur. Nous appellerions volontiers cet artifice la cadence ascendante, s’il n’y