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frayant assidûment avec les prêtres, fréquentant les églises, encourageant les fondations pieuses, qu’il juge propres à favoriser parmi ses sujets les pratiques de la religion, auxquelles il consacre lui-même plusieurs heures par jour ; il fait à genoux ses prières du matin et du soir ; il les prolonge de telle sorte que de larges callosités se forment sur ses jambes où on les découvrira après sa mort. A travers ses paroles et ses actes, sa religiosité apparaît de plus en plus éclatante. Lorsque les affaires de l’État se résolvent conformément à ses désirs, il se plait à proclamer qu’il le doit à la Providence. C’est ainsi qu’en mars 1818, satisfait du dénouement d’une entreprise qui lui était à cœur, il écrit à Kochéleff :

« Ce peu de part que j’ai eu pour ma personne à ce résultat est justement ce que je trouve de plus satisfaisant. Cela devient visiblement une œuvre de Dieu et c’est là ce qu’il fallait. Rendez-moi la justice d’avouer que chaque fois qu’il en a été question entre nous, je vous ai toujours répété que j’avais une foi complète que le Sauveur arrangera cette affaire Lui-même dans le temps opportun. Mon attente, comme vous le voyez, n’a pas été trompée et j’aime mille fois mieux un résultat amené purement par la foi et la prière que par une opération humaine... Aimons à Lui tout devoir, à ne mettre notre esprit qu’à Lui et à ne tout attendre que de Lui seul : alors tout viendra en son temps et à propos. Mais pour cela, redoublons de ferveur, de foi de sévérité sur nous-même et de notre confiance dans Sa Miséricorde Divine. »

Ce langage, on le reconnaîtra, révèle une âme profondément préoccupée des choses religieuses et pour qui elles sont devenues la principale affaire de la vie. Il autorise même à penser que, troublé par les contradictions dogmatiques existant entre la confession romaine et la confession orthodoxe dont il était le chef, Alexandre a du maintes fois se demander de quel côté était la vérité.

Faut-il aller plus loin et admettre que cette recherche a ébranlé ses convictions antérieures et l’a fait pencher en faveur du catholicisme ? Je n’oserais le soutenir, et c’est une hypothèse que, pour sa part, le grand-duc Nicolas repousse énergiquement. Mais, quelle que soit l’autorité de ses dénégations, on y peut opposer certains faits qui les contredisent. Ils ont été mis en lumière par un savant jésuite, le P. Pierling, à qui ses origines