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d’expliquer l’influence qu’en Russie et à l’étranger, il a exercée sur les événemens de son temps.

La tâche dont l’éminent historien nous présente aujourd’hui le résultat, était assez malaisée, de nombreux documens propres à la faciliter ayant été systématiquement anéantis par l’empereur Nicolas Ier, successeur d’Alexandre. Mais, à force de recherches dans les archives publiques et privées, recherches dont les volumineuses annexes de son ouvrage nous livrent les fruits, il est parvenu à combler cette lacune et à réunir assez d’élémens d’information pour rendre complet le tableau qu’il a voulu peindre.

Il a divisé son œuvre en cinq grandes parties : de 1801 à 1807, c’est ce qu’il appelle la période d’hésitation, c’est-à-dire l’histoire des tentatives, par momens désordonnées et souvent contradictoires, faites par l’Empereur pour régénérer la Russie et améliorer le sort de ses sujets ; de 1807 à 1812, c’est la paix de Tilsitt et l’alliance avec la France ; de 1812 à 1815, la lutte avec Napoléon et ses tragiques épisodes ; de 1815 à 1822, la série des congrès : congrès de Vienne, congrès d’Aix-la-Chapelle, congrès de Vérone, d’autres encore où, sous le mysticisme qui s’est emparé de l’âme d’Alexandre, se trahissent les contradictions de sa politique aussi bien dans le gouvernement de son empire que dans les directions qu’il s’efforçait d’imprimer aux affaires de l’Europe ; enfin, de 1822 à 1825, année de sa mort, c’est l’exposé du désenchantement général qu’éprouve la Russie en voyant le gouvernement livré entièrement au favori Arakchéeff et cette sorte d’abdication à laquelle se prêtait le souverain dont l’avènement avait été salué avec enthousiasme. A chacune de ces périodes, le grand-duc Nicolas a consacré de longs récits. Grâce à lui, nous pouvons suivre l’Empereur à travers les péripéties auxquelles il fut mêlé et nous rendre compte de son incessant effort, trop souvent trompé, pour les faire tourner à sa gloire, au bien-être de ses sujets et au profit de la paix continentale.

Condamné par les circonstances à une longue suite de guerres, alors qu’il souhaitait la paix, l’empereur Alexandre, sur tous les théâtres où il a évolué, apparaît comme un être indécis, capable de louables résolutions, mais inhabile à y persévérer et laissant trop souvent les opinions d’autrui se substituer aux siennes. Ce n’est pas qu’il ne fût animé de convictions réfléchies