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La cavalerie allemande, à l’inverse de la nôtre, n’emprunte aucun élément à la réserve. La mobilisation de l’artillerie, jusqu’à ces derniers temps, n’était pas plus rapide d’un côté des Vosges que de l’autre, parce qu’elle se subordonnait à l’opération relativement lente de la réquisition des chevaux ; mais le programme soumis au Reichstag comporte l’acquisition de 28 000 animaux, grâce auxquels l’artillerie se trouvera en partie affranchie des sujétions qu’elle subit aujourd’hui. Il est intéressant d’observer à ce sujet que l’exportation des chevaux français en Allemagne a passé de 4 474 en 1909, à 6 244 en 1910, à 6 873 en 1911, à 7 213 en 1912, qu’elle marquait en janvier 1913 une augmentation de 22 pour 100 sur le mois correspondant de 1912, et que, bien servi par notre indifférence et notre incurie, le programme des achats de 1913 pourra être promptement réalisé.

Rien n’empêchera plus alors l’Allemagne d’exploiter, au point de vue de la mobilisation, cette même richesse en hommes, qui fait sa force numérique en temps de paix. Ces deux avantages, complémentaires l’un de l’autre, trouvent chez nous leur contre-partie dans la prédominance de l’élément réserve sur l’élément actif et dans la lenteur un peu plus grande de notre passage au pied de guerre. Les Allemands font état de cette différence, qu’ils associent dans leur esprit au retard supposé d’élémens auxiliaires, attendus chez nous d’outre-mer, et ils croient pouvoir en conclure qu’ils auront en face de nous l’initiative des opérations.

La zone prévue de leur concentration est la Lorraine allemande, du Mont Donon à Pont-à-Mousson. Cette région, largement innervée par le réseau ferré, abonde en quais de débarquement ; mais différens indices, et notamment le grand nombre de lignes nouvelles ou de tronçons de raccordement, tracés depuis peu dans le Luxembourg belge, ont fait croire qu’une partie de leur offensive déborderait de ce côté jusqu’à la Meuse, peut-être même au delà. S’il en était ainsi, le dispositif allemand du début présenterait dans l’ensemble un caractère linéaire, et tout en ressemblant, avec une amplification colossale, à l’ordre tactique de Frédéric II, s’inspirerait aussi de l’idée frédéricienne de l’enveloppement.

Il n’y a là qu’une modalité possible parmi beaucoup d’autres, telles que la rupture centrale ou l’enveloppement double par les