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la solution de ce problème ? La. philosophie est la méditation de la mort, et la science en est l’étude méthodique.

Seulement, la philosophie et la science n’ont rien trouvé qui ait changé notre idée de la mort. Voilà encore un fait. La philosophie à laquelle aboutit M. Maeterlinck est une espèce de combinaison platonicienne et qui ne doit absolument rien à des systèmes plus récens. Et la science ? M. Maeterlinck avait mis un peu d’espoir dans les expériences des spirites : puis il a dû renoncer à les suivre. Pourquoi donc s’étonne-t-il de nous voir attachés à une ancienne idée de la mort ?

Cette ancienne idée de la mort est de qualité religieuse. Or, Pascal a établi décidément que la philosophie et la science sont d’une autre nature que la religion, ne dépendent pas de la religion et que la religion ne dépend pas d’elles. Ni la science ni la philosophie n’ont organisé une idéologie, et ne l’organiseront, une idéologie qu’on doive substituer à la croyance. Elles bâtissent à côté de la religion ; mais elles ne bâtissent pas sur le terrain déblayé de la religion.

M. Maeterlinck se proposait pourtant, — et ce fut sa visée principale, — de substituer à l’idée religieuse de la mort une idée scientifique... il y renonce... et puis une idée philosophique de la mort. Il supprimait l’idée religieuse et remontait plus haut dans l’histoire de la pensée humaine, jusqu’à la pensée antique.

Supprimer l’idée religieuse de la mort ? Il y échoue deux fois : en logique, et puis en réalité.

Son argument, je le rappelle : la religion ne nous apporte pas une preuve. Mais la réplique de Pascal : — la religion n’a pas à donner de preuve ; ou bien elle serait une philosophie, et non pas une religion, — cette réplique de Pascal, où est enfermée l’essence même du principe religieux, la considère-t-il comme non avenue ? Il ne la discute pas ; et il chante victoire beaucoup trop vite.

En second lieu, cette formule selon laquelle la religion ne donne pas sa preuve, que vaut-elle ? Peu de chose. La religion, premièrement, s’appuie sur des témoignages : ce sont les évangiles. Ces témoignages constituent, — bonne ou mauvaise, — la preuve ; et non pas (il ne le faut pas) la preuve philosophique, mais : il le faut) la preuve historique. Que valent ces témoignages ?

Ou je me trompe, ou la question n’est point ailleurs : elle est là. Et la question religieuse est une question d’histoire, une question d’exégèse historique. Or, nous vivons sous l’impression, — je ne veux pas d’un mot moins vague, — sous l’impression de l’exégèse renanienne. Nous en avons reçu l’influence et nous la conservons, même après que