Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 14.djvu/685

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

M. Pacotte. Après vingt ans d’exploitation, la compagnie a payé une seule fois un dividende. Il lui manque pour réussir cette force et cette unité qui existent en Rhodesia avec la Chartered, ou à Quilimane dans la Compagnie du Madal qui, avec des capitaux monégasques et français, est restée française, possède un personnel de premier ordre, une administration modèle, a pacifié complètement son territoire où la sécurité règne.

Il n’y a pas de solidarité. Une des plus puissantes maisons françaises d’Afrique, fermant ses comptoirs au Mozambique, n’a rien tenté pour se substituer des Français. C’est une maison allemande qui, en y gagnant une belle commission, a permis de travailler et de faire fortune à un Français intelligent d’Inhambane : presque toutes les maisons fi-ançaises lui refusaient du crédit sans vouloir rien examiner, d’autres lui offraient seulement de tirer sur elles 40 pour 100, ce qui était faire travailler a leur bénéfice son propre capital.

Cet homme remarquable n’hésite pas à déclarer que ce qui ruine notre influence, c’est l’absence de Français. Il en faut dans un pays ; alors, habitués qu’ils sont aux denrées de fabrication nationale, ils en réclament pour eux, ensuite les répandent. Puisque l’on paie les Indiens de 150 à 200 francs par mois, on peut attirer des employés européens qui aient la patience de venir étudier la place, en tant que commis, avant de risquer leur propre avoir. Et il serait facile de créer de petites maisons françaises. On réclame des Français pour les maisons de négoce et les voyages de commerce à l’intérieur ; on en réclame pour proposer et colporter partout nos marques industrielles, notamment celles d’automobilisme nautique ; on en réclame pour les sucreries ; on en réclame pour les plantations. A Lourenço où règne encore une maison alsacienne, ne sont-ce pas de nos nationaux qui jadis établirent l’électricité et les tramways, distribuèrent l’eau potable, manipulèrent le tabac indigène, introduisirent et répandirent le ciment armé ? S’ils ne furent pas assez nombreux à explorer comme M. Frivier pour la science botanique, du moins nos ingénieurs furent chargés de tracer le chemin de fer (1891) et d’établir les phares. Et plus les Français se multiplieraient, plus ils pourraient utiliser les Grecs, souples et laborieux, démocrates s’entendant au mieux avec les Portugais, qui autrefois relevaient de nos consuls et toujours se réclament de notre puissance comme de notre civilisation, et