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très bien payés, les employés de leur télégraphe qu’ils maintiennent en face du télégraphe français bien que le leur ne fasse rien, même les fonctionnaires de la Rhodesia passent leur temps à voyager dans l’intérieur sous couleur de chasser, à enquêter, à rapporter ; ils ont beaucoup plus d’autorité que les agens allemands eux-mêmes. Sur leurs renseignemens, leurs nationaux demandent des concessions, qui leur ont été accordées en grand nombre jusqu’à la proclamation de la République. Ils n’en peuvent au demeurant rien tirer, car l’eau manque ; les indigènes vont recueillir les produits de la forêt, mais n’y habitent pas ; en outre, il faut payer plus tard jusqu’à 50 000 francs pour délimiter une propriété de quelque importance. Cependant l’activité privée des Anglais fut nulle ces dernières années en Zambésie : leur flottille a quasi disparu ; la concession de Chinde, port naturel de la British Central Africa s’est envasée ; une grande maison allemande et le menu commerce portugais ont supplanté leurs stores ; le pavillon britannique, jusqu’à l’an dernier, ne se montrait jamais dans les petits ports, seuls producteurs.

Mais l’Union Castle Line vient de se décider à de gros sacrifices : on annonce qu’elle accaparera tout le trafic, grâce au concours des maisons françaises et anglaises. Parallèlement, une famille de banquiers de Johannesburg, enrichie à l’origine comme plusieurs dans l’achat frauduleux des diamans, se préoccupe d’acheter, après les avoir discréditées, — ou comme on dit là-bas « boomées et crakées, » — les actions de la Compagnie portugaise du Nyassa, maîtresse de la province du Nord (250 000 kilomètres carrés) pour la relancer à grand fracas de réclame. Elle se trouve sérieusement soutenue à Londres par le gouvernement.

Les Allemands s’en inquiètent ! C’étaient justement ces provinces voisines de leur Deutsch Ost Afrika qu’ils convoitaient. : Tous les traités que la presse, avec constance depuis 1898[1], dénonce avoir été machinés alors secrètement entre les deux grandes puissances pour le partage éventuel du Mozambique,

  1. L’an dernier encore The Saturday Review publiait un article copieusement documenté sur la cession de certaines colonies portugaises à l’Allemagne. The Standard lui attribuait le Sud du Congo et le Mozambique à partir du Zambèze, 352 000 kmq ; 3 millions et demi d’habitans. Cf. aussi la Neue preussische Correspondenz, et en France : Angel Marvaud, le Portugal et ses colonies ; ~ Alfred Guignard, Allemagne et Portugal (le Loup et l’Agneau).