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ville neuve sur le continent en face de l’Île, soit de demeurer dans celle-ci en la reliant à la terre. De cette base solide on pourra occuper la province, la plus riche de la colonie, et qui ne reste sans colons que parce qu’elle est insoumise ; il y faudra seulement employer quelques compagnies de soldats, dont on pourrait confier l’éducation à un officier supérieur français comme a fait la Grèce. Centre de production, Mozambique redeviendrait ainsi la métropole de l’ivoire. Jadis elle déchut au profit de Zanzibar, parce que les nègres demandaient toujours de la poudre en échange des défenses d’éléphans et que, selon leur système ancien, les Portugais interdisaient d’en donner ; pareilles interdictions ne sauraient plus être d’usage, et le trafic, capté artificiellement par le port allemand voisin Dar-es-salam, suivra de nouveau son ancienne voie naturelle.

Le gouverneur de chaque province nourrit son grand projet pour lequel il s’ingénie jalousement à attirer la confiance et les subventions de l’État, « sa province se révélant la meilleure. » Il écoute avidement les récits des colons qui ont circulé sur le territoire, interroge les étrangers et les presse d’intéresser leurs pays à l’ « affaire, » s’entoure de cartes à échelle maxima sur lesquelles il esquisse les futures voies ferrées. La plus ambitieuse, impérieusement, relierait à une baie voisine d’Ibo le lac Nyassa, suivant une ligne beaucoup plus courte que la ligne du territoire allemand à laquelle elle reprendrait ainsi le trafic, qui lui revient de droit naturel, — géographique : le projet de voie germanique de Kiloa au lac, dont, en novembre 1912, le Gouvernement a décidé de construire un tronçon, pourrait être aisément prévenu. La plus pratiquement réalisable doit rattacher Quilimane à Tété, drainant la production du vaste delta où peuvent pousser tant de cannes, autant d’arachides qu’on voudra, — et plus on en plante, plus l’industrie européenne lui trouve des débouchés, — le coton qu’on peut espérer multiplier dans cette Égypte australe, le tabac ici très hautement titré, le café, des arbres fruitiers dont les navires réfrigérans transporteront les cargaisons en Europe. En attendant, l’administration vient, il y a un mois, de décider la construction du grand embranchement de Machequece au Zambèze.

Les 780 000 kilomètres carrés du Mozambique forment incontestablement une contrée très riche, beaucoup plus riche que les colonies voisines de l’Angleterre et de l’Allemagne. Le cuivre,