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Les tendres consolations paternelles ne pouvaient cependant pas être un rempart contre les chagrins que, pour la Duchesse d’Orléans, chaque occasion faisait naître.

L’approche des fêtes pascales lui en ménageait un qui lui permit de mesurer la profondeur du fossé creusé entre elle et son fils aîné, sur un point qui lui tenait particulièrement au cœur.

Le Duc de Penthièvre avait envoyé à sa fille cette instruction :


A la ville d’Eu, le 9 avril 1791.

« Ma tendresse pour vous, ma chère enfant, et ma qualité de père, demandent de moi de vous avertir à l’approche de Pâques qu’il ne faut pas vous confesser à un prêtre sermentaire, ni fréquenter les églises sorties de l’orthodoxie ; ma santé est toujours infiniment souffrante. J’embrasse ma chère enfant de tout mon cœur[1]. »

La Duchesse d’Orléans était trop en communauté de sentimens avec son père pour ne pas transmettre ce billet au Duc de Chartres :

« Je t’envoie, mon cher ami, une lettre que je viens de recevoir de ton grand-père, à Rouen. C’est une réponse à des questions que je lui ai faites relativement à mes Pâques : ayant toute ma vie été guidée par lui, je désirois l’être sur le point le plus essentiel. Voilà ce qu’il me répond. Ma tendresse pour mes chers enfans et mon devoir me font une loi de leur communiquer cette lettre ; et comme je ne serai pas à Paris au moment de Pâques, c’est toi, mon cher ami, que je charge de la lire à tes frères et à ta sœur. Je leur écrirai à tous sur cet objet : mais comme je ne le puis pas encore, je te prie d’y suppléer en leur montrant cette lettre de mon père, que tu me renverras sur le champ après. Je viens d’arriver entièrement souffrante et fatiguée ; mais les consolations que je suis sûre de trouver auprès du meilleur des pères me ranimeront. Je désire pour ton bonheur et pour le mien que tu m’aimes comme je te chéris.

« J’embrasse tous mes chers enfans. »

  1. Cette lettre et la suivante ont été publiées dans la Correspondance de L. P..J. d’Orléans ; nous avons cru devoir, néanmoins, les reproduire ici pour l’intelligence de ce qui va suivre.