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de faiblesse, de fausseté (ces dernières paroles me firent un grand effet). Enfin à tout ce que je vous dis pour vous engager à renoncer à votre projet, à laisser les choses comme elles étoient, vous me dites toujours que cela ne se pouvoit plus, que tout valoit mieux et qu’il falloit en finir, parce qu’au moment de vous en aller, vous vouliez du moins tout arranger avant votre départ.

« Comment après tout ce que je vous rappelle, et une infinité d’autres choses que je ne vous rappelle pas, comment, dis-je, pouvois-je croire que vous n’aviez pas entendu ce que je vous avois dit et répété cent fois. Mais vous m’avez dit, au moment même de mon retour de Bellechasse, en me témoignant du mécontentement, qu’il étoit inutile de récriminer, puisque c’étoit une chose faite. Je me flattois alors, d’après la connoissance que je croyois avoir de votre caractère, que nous pourrions, après que vous seriez un peu calmé, causer des objets qui nous intéressent également ; vous me l’aviez même dit vous-même, mais votre lettre renverse toutes mes idées. Si je ne reconnaissois votre écriture, je ne pourrois pas la croire de vous. Vous allez voir combien peu mon intention étoit de changer le plan de leur éducation, et les écarter de vos principes par le plan que je comptois vous proposer. C’étoit d’abord de conserver toutes les personnes qui sont auprès d’eux, de faire continuer le journal de M. Le Brun, de vous faire apporter tous les matins celui de la veille, afin que nous en fissions la lecture ensemble si vous vouliez. Je comptois ainsi vous dire que vous me donneriez ce que vous trouveriez convenable pour leur table, et qu’en conséquence, je me chargerois de tout ce détail qui deviendroit bien moins cher. Je voulois aussi changer ma manière de vivre, ne plus donner à dîner et dîner moi seule de ma personne avec mes enfans, hors un jour ou deux par semaine où ils auroient pu dîner chez moi, comme cela a toujours été, avec du monde. Je croyois que la certitude de ne jamais trouver que mes enfans et moi à dîner, vous engageroit à venir souvent vous réunir à nous ; vous auriez pu aussi, comme de raison, amener les personnes qui vous auroient convenues, ce que je m’étois interdit à moi-même dans la crainte toujours que l’on ne vous persuade que je voulois les écarter de vos principes ; mes enfans ne dévoient pas voir ma société plus qu’ils ne la voient à présent. Je m’étois flattée un moment