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mode de communiquer restât tel qu’elle l’avait espéré ! car la situation, liée au cours des événemens politiques, va s’aggraver rapidement et la querelle s’envenimer.

La Duchesse qui répugnait à trouver Mme de Genlis en tiers avec ses enfans n’allait plus que rarement les voir à Bellechasse. Il avait été convenu que ceux-ci viendraient trois fois par semaine dîner au Palais-Royal. Au mois de mars 1790, le Duc de Chartres prévient sa mère qu’il n’y pourra plus venir que deux fois. Évidemment le jeune prince, entrant avec la fougue de son âge dans les idées nouvelles, préfère à la tendre intimité des repas maternels les réunions de Monceaux où il s’enthousiasme des propos de Pétion, Voidel, Barrère. Madame d’Orléans répond à ce cruel empiétement sur ces chères réunions en rompant définitivement avec Mme de Genlis et en exigeant cette fois son départ.

Père et enfans considèrent cette extrémité à l’égal d’une catastrophe. Après de longues discussions, on parvient cependant encore à faire accepter à la Duchesse une sorte de modus vivendi qu’elle résume ainsi :

« Ce que je désire est d’être consultée sur ce qui regarde l’éducation de mes enfans et je me flatte bien que nous serons souvent d’accord, mais quand cela ne sera pas, après vous avoir fait des représentations et vous avoir dit mes raisons, je me soumettrai et ce sera moi qui vous répondrai que votre volonté sera exécutée. Je désire en être l’instrument et je ferai avec grand plaisir tous les sacrifices de temps nécessaires pour remplir cet objet…

« Vous semblez craindre que je communique à mes enfans mes opinions. Vous vous trompez bien, je les aime trop pour cela et je sens que ce seroit faire leur malheur que de leur donner de l’humeur contre un état de choses qui s’établit et sous lequel ils sont destinés à vivre ; mais je ne les porterai jamais à l’exagération et je leur conseillerai d’avoir une opinion à eux. »

Comment Mme de Genlis se conforma-t-elle aux conventions nouvelles ? La Duchesse elle-même nous l’apprend :

« Il vient de m’arriver la chose la plus inconcevable, la plus imprévue, vous scavés que ma fille m’avoit dit que Mme de Sillery comptoit venir diner aujourd’huy, que je lui avois répondu suivant nos conventions, etc., quand je vous parlai de cette histoire, vous la traitâtes de radotages, etc., et en effet,