Dans la notice, toute vibrante encore de sa douleur, que Mme de Staël consacrait à la mémoire de celui qui lui avait été si cher, elle écrivait ces lignes : « Je publierai un jour les lettres de mon père. C’est moi qui suis la plus riche entre ses amis, car il n’a pas laissé passer, quand nous étions séparés, un courrier, un seul courrier sans m’écrire[2]. » La publication intégrale des lettres de M. Necker ne présenterait pas autant d’intérêt que le croyait Mme de Staël. Parfois sarcastiques et spirituelles, parfois un peu incorrectes de forme, toujours mesurées et sagaces, elles sont malheureusement remplies de beaucoup de détails intimes et de petites nouvelles locales qui les alourdissent. Je me bornerai donc à tirer de ces lettres quelques extraits. Dans ces extraits on verra, on quelque sorte, se refléter Mme de Staël elle-même. À travers les marques de tendresse que son père lui prodigue, tendresse qui n’exclut cependant pas la clairvoyance, et les judicieux conseils qu’il lui