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SAINT AUGUSTIN[1]


Inquietum est cor nostrum, donec requiesca in te ! ...
Notre cœur est inquiet, mon Dieu, jusqu’à ce

qu’il se repose en Toi !...

(Confessions, I, I.)


PROLOGUE

Saint Augustin n’est plus guère qu’un nom fameux. En dehors des milieux théologiques ou érudits, on a cessé de le lire. Telle est la vraie gloire : on admire les saints, comme les grands hommes, de confiance. Ses Confessions elles-mêmes, on n’en parle généralement que par ouï-dire. Expierait-il, sous cette indifférence, le regain de gloire dont il brilla au XVIIe siècle, lorsque les jansénistes l’associèrent, avec un invincible entêtement, à la défense de leur cause ? Le renom d’austérité chagrine et de contentieuse et ennuyeuse prolixité qui se lie au souvenir des écrivains de Port-Royal, — Pascal excepté, — aurait-il rejailli sur r œuvre d’Augustin enrôlé malgré lui dans les rangs de ces pieux sectaires ? Pourtant, s’il y a des hommes, qui ne lui ressemblent pas et que, probablement, il eût poursuivis de toute son éloquence et de toute sa dialectique, ce sont les jansénistes. Sans doute, il eût dit avec dédain : « le parti de Jansen, » de même qu’autrefois, dans son attachement à l’unité catholique, il disait : « le parti de Donat. »

Avouons aussi que le seul aspect de ses œuvres épouvante, — qu’il s’agisse des énormes in-folio en deux colonnes de l’édition

  1. Copyright by Louis Bertrand, 1913.