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trop spécialisée les préparait mal toutefois à la généralisation de leur autorité ; à de très rares exceptions près, ils s’y montraient inférieurs.

L’évolution technique de la Marine et l’extension des connaissances nécessaires à un officier rendaient impossible le maintien d’un semblable recrutement. Chacune des spécialités de la Marine devenait de plus en plus un métier qui absorbait l’officier marinier ; il lui consacrait son temps et sa vie.

Un pareil état de choses aurait dû, comme conséquence, nous faire entrer résolument dans la voie qui semble suivie actuellement : créer, multiplier, employer des adjudans principaux, assurer ainsi l’avenir de la maistrance, dans chaque spécialité et dans un corps nouveau d’ « Officiers des Équipages de la Flotte. »

Un autre ordre d’idées prévalut, et l’Ecole de Brest fut créée. Elle n’a pas donné et ne pouvait donner les résultats espérés ; non pas qu’elle n’ait produit certains officiers capables, mais l’esprit de sa création, les conditions de son recrutement s’opposent à son heureux développement.

Elle reçoit, après des examens que l’on s’efforce de rendre de jour en jour plus sévères, des jeunes gens sans expérience, sans services rendus, sans instruction suffisante. Ce sont, en fait, des privilégiés dont la maistrance s’explique et accepte difficilement la faveur. L’Ecole leur donne une instruction qui veut se rapprocher de celle de l’Ecole Navale et les sujets ainsi préparés fusionnent à bord du Duguay-Trouin avec les aspirans sortis du Borda. Le vice capital de cette institution est l’insuffisance de l’instruction générale initiale. Ce n’est point et ce ne peut être, en effet, sans raison et sans nécessité, que l’on exige des élèves admis à l’Ecole Navale une culture littéraire et scientifique déterminée, base indispensable de l’enseignement technique supérieur.

En dépit d’un travail acharné, d’un excellent esprit, d’un zèle de tous les instans, aucune formation, aucun enseignement ne seront réellement efficaces, si cette base n’existe pas, et comment existerait-elle dans les conditions de recrutement de l’École ?

Cependant cette École est née, elle vit, elle ne peut disparaître ; mais elle doit évoluer, elle aussi, dans une voie de fusion, ou mieux de raccordement, non plus avec le Duguay-Trouin