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cause, il devient le leader, que les Chambres le veuillent ou non ; elles se trouveront en une si mauvaise posture qu’elles seront forcées de céder... Le président doit étudier le tempérament et l’état d’esprit des deux Chambres avec lesquelles il va travailler, s’il veut amener son parti, ainsi que la nation, à accepter son programme et les mesures qu’il désire appliquer. La partie du gouvernement s’adressant le plus directement à l’opinion a la meilleure chance de réussir, et jusqu’à présent c’est là la part du président.


M. Wilson, dans ces derniers mois, a fait un pas décisif vers un appel à la nation. Il a usé d’un procédé que, à moins que nous ne nous trompions, aucun président élu mais non pas encore installé, n’avait employé. Nous voulons parler de la série d’articles qui ont paru dans The World’s Work, articles dont il a été question plus haut et qui constituent une espèce de profession de foi publiée avant la lettre. Lorsque, en quittant la Maison-Blanche, M. Roosevelt devint un collaborateur régulier de l’Outlook, certains milieux considérèrent que cette conduite manquait de convenance. M. Wilson est allé plus loin, et nous retrouvons encore ici sa manière de faire lorsqu’il était gouverneur et qu’il adressait au peuple de New Jersey des messages remplis de ses actes et de ses projets politiques. Il n’est donc pas étonnant de voir certains journaux américains se demander : « N’aurons-nous pas, après tout, en Wilson un autre Roosevelt ? » Cette rumeur commença à circuler lorsque, dans une conférence publique faite en décembre, M. Wilson menaça de « pendre plus haut qu’Haman quiconque essayerait de créer artificiellement une panique financière, » et lorsque, quelque temps après, il déclara qu’il avait l’intention d’arborer pour quatre ans son war paint (couleur dont les Indiens s’enduisent la figure avant de faire la guerre). Mais je crois qu’on se rapprocherait davantage de la vérité en répétant ce qu’il a dit, dans son histoire du peuple américain d’un de ses prédécesseurs à la présidence, M. Grover Cleveland, qui lui aussi, appartenait au parti démocratique : He was not touched with the older sophistications of politics, his face sel forward, his gifts the gifts of right action[1].


THEODORE STANTON.

  1. « II ne se laissait point toucher par les sophismes démodes de la politique, il envisageait l’avenir, et il avait la faculté d’adapter exactement son action aux circonstances. »