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caractère, de son expérience, de son choix dépendent les solutions de la plus grande importance pour l’avenir. Il peut se développer d’intéressantes choses par ce singulier changement… Il se peut aussi que ce revirement du pouvoir exécutif, qui semble durable, ait un effet très étendu sur tout notre système de gouvernement.


Dans les conférences données à Columbia, M. Wilson considère que cette impulsion continue, en effet, à se manifester et que l’influence énergique de M. Roosevelt a eu son contre-coup sur le système du gouvernement. Voici ce qu’il dit en 1908 :


Désormais notre président devient une des grandes forces mondiales, qu’il agisse prudemment ou non… C’est à peine si nous commençons à envisager la présidence sous ce jour, et c’est cependant à ce point de vue qu’il faudra désormais le faire ; et de plus en plus son caractère influencera et déterminera la politique de la nation. Nous ne pouvons plus à l’avenir cacher notre président comme un simple ministre de l’Intérieur… Il faudra toujours le voir à la tête des affaires et le poste aura toujours les mêmes proportions que celui qui l’occupe… À mesure que les devoirs du président augmenteront avec les activités, les forces nouvelles de la nation s’agrandissant, le président futur arrivera à la conclusion que le meilleur moyen d’administrer est de se sentir de moins en moins un fonctionnaire exécutif et de se regarder, au contraire, comme directeur d’une grande entreprise et leader de la nation, un homme entreprenant et actif recherchant toutes les améliorations… Dans l’esprit de ceux qui dictèrent notre constitution, le président devait représenter un modèle de royauté amendé d’après les idées whigs ; mais le président a quitté son modèle pour s’adapter aux circonstances d’une façon tout américaine… Le principe qui rend possible au président américain de concentrer en lui-même, s’il le désire, un pouvoir et une influence supérieurs à toute autre personne faisant partie du gouvernement, vient en grande partie de ce que le pays tout entier s’intéresse à sa personne comme étant le seul grand leader national ; et c’est avec ardeur que ses concitoyens désirent entendre ce qui leur vient de lui.


Ce qui déplaît surtout à M. Wilson dans le système gouvernemental des États-Unis, et cela est vrai de la Constitution fédérale comme de celles des États de l’Union, est l’excessive séparation entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Il s’exprime ainsi à ce sujet :


On ne saurait dire que le président est le leader et le guide du gouvernement tout entier, car ce dernier se divise entre le Sénat et la Chambre, et c’est en cela qu’il diffère de tous les autres gouvernemens du monde. Dans chacune des parties ainsi subdivisées se trouve, par arrangement spécial, un leader. Le Sénat consent à se laisser diriger par un petit groupe de sénateurs, très jaloux de l’indépendance du corps qu’ils dirigent ; la