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toujours cru à l’utilité d’une organisation ferme dans un parti politique ; » et il aurait pu ajouter : « ainsi que le croyait Edmund Burke.» Dans son premier volume d’essais, s’en trouve un intitulé : Étude sur la Politique, où on lit : « Il y a tout lieu de croire que dans les pays où les hommes votent aussi bien qu’ils écrivent, ils ne votent pas toujours suivant leurs opinions, mais selon leurs partis ; ils se montrent par là de meilleurs citoyens. Du fond de leurs bibliothèques, ils sont en pensée avec leurs maîtres, mais au dehors avec leur parti. En un mot, comme des hommes raisonnables, ils comprennent la différence qui se trouve entre les possibilités abstraites et les possibilités pratiques. »

Cet épisode du cercle à New York nous montre déjà chez M. Wilson, à côté du penseur et du théoricien, l’homme politique en formation.

Pendant ses années d’étude et de préparation, Montesquieu occupe son esprit après Bagehot et Burke, bien qu’à un moindre degré que ces derniers. Il parle de l’auteur de l’Esprit des Lois comme d’ « un des précurseurs de cette belle légion de philosophes historiens qui ont tant contribué à éclairer les époques nébuleuses et reculées de l’humanité et qui ont établi sur une base de vérité les premiers rudimens de la philosophie historique. » Dans Mere Literature, il ajoute : « Celui qui a connu un homme intelligent et instruit, habile, pénétrant sans passions dans les recoins intimes de l’histoire, en a saisi les raisons, les buts, les machinations et qui sait en parler éloquemment et retenir l’attention par une force et une sagacité à lui personnelles, celui qui aura connu un tel homme comprendra aisément pourquoi nous nous tournons vers Montesquieu. » Enfin, dans le Constitutional Government, M. Wilson parle encore de « l’esprit lucide du philosophe français. » « Les hommes d’Etat américains qui nous ont précédés citent, dit-il, Montesquieu plus volontiers que tout autre ; il est d’après eux un modèle-type dans le champ politique. Sous son doigt, la politique devient un mécanisme et la théorie de gravitation, cette théorie de freins et de balanciers que j’ai appelée le système newtonien de gouvernement, y arrive à la suprême perfection. »