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Ici le procède est devenu classique, et non sans raison. Les époques de trouble ne sont pas favorables au placement de rentes consolidées, qui ne peut guère se faire alors qu’à des taux anormaux. L’État semble donc avoir avantage à s’engager à payer un intérêt élevé pour une courte période, au bout de laquelle, la paix étant rétablie, il pourra liquider sa dette en émettant un emprunt dont les conditions seront moins onéreuses. C’est ainsi que la Russie se procura les premiers fonds nécessaires à la campagne contre le Japon par la vente, au printemps de 1904, de 800 millions de francs de bons 5 pour 100 à l’échéance de cinq ans. Les porteurs de ces bons ont été remboursés au moment de l’émission de l’emprunt 5 pour 100 de 1906, à la souscription duquel ils eurent un droit privilégié.

L’Italie, en 1912, pour couvrir en partie les frais de la guerre libyenne, a créé 300 millions de lire (francs) de bons 4 pour 100 à l’échéance de cinq ans, qui ont été acquis en presque totalité par un syndicat de banques indigènes. D’après l’exposé que M. Tedesco, ministre du Trésor, a soumis le 7 décembre 1912 à la Chambre des Députés de Rome, il comptait rembourser ces bons au moyen d’excédens budgétaires et éviter ainsi de rouvrir le Grand Livre de la Dette publique. Toutefois, comme, selon des nouvelles récentes, une nouvelle émission de bons vient d’avoir lieu, la consolidation de tout ce passif au moyen d’une création de rentes parait inévitable. Si néanmoins l’espoir du ministre se réalisait, cette solution du problème aurait été la plus élégante de toutes, puisqu’elle aurait couvert les dépenses d’une guerre sans augmenter d’une façon définitive le capital de la Dette.

Au cours de la guerre balkanique qui a éclaté en octobre 1912, les belligérans ont eu recours à l’émission de bons du Trésor. La Turquie avait déjà, pour les besoins de la campagne engagée contre l’Italie depuis l’automne de 1911, négocié à plusieurs reprises des bons, que des groupes de financiers français et allemands avaient souscrits. Le total des engagemens qu’elle a contractés de ce chef, en y comprenant sa dette en compte courant chez la Banque Ottomane, tenue de par ses statuts de faire certaines avances à la Porte, approche de 300 millions de francs. La Bulgarie avait émis des bons, pour 40 millions de francs, dès le printemps de 1912 ; elle en a négocié encore autant au mois de décembre. Elle a en outre créé des délégations d’une