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moderne, qui n’a d’abord été qu’une sorte d’expédient empirique, a peu à peu été érigé en théorie scientifique : il a reçu le nom de l’étalon du change en or (gold exchange standard) et il a trouvé sa place à côté de l’étalon d’or, de l’étalon d’argent, du double étalon et de l’étalon boiteux. Il a été appliqué non seulement par les gouvernemens, mais par des banques particulières. C’est ainsi que, grâce à la prospérité de l’Océanie Néerlandaise, la Banque de Java a pu accumuler dans la mère patrie des réserves métalliques, dont une partie, par le jeu naturel des changes, a déjà reflué vers les colonies. Par cette infusion d’or dans leur circulation, celles-ci se trouvent amenées peu à peu au régime de l’étalon boiteux, qui se substitue à celui du change en or, en attendant qu’il soit un jour remplacé par celui de l’étalon d’or pur et simple. Les réserves métalliques étrangères d !une banque d’émission privilégiée jouent, sous ce rapport, le même rôle que celles d’un trésor public. C’est pourquoi le cas de la Hollande est comparable à celui de pays où la régularisation de l’unité monétaire est directement assurée par les soins du Gouvernement. L’histoire de ce qui s’est passé dans l’Inde anglaise depuis vingt ans fera comprendre la portée et le mécanisme d’un système qui tend à se généraliser.

Jusqu’en 1893, la monnaie indienne libératoire était la roupie d’argent, dont la frappe était libre et dont la valeur, comparée à celle de l’or, variait selon les fluctuations du cours du métal blanc. Comme celui-ci avait baissé à peu près de moitié depuis l’époque où la teneur et le poids de la roupie avaient été fixés, le rapport de l’unité indienne à la livre sterling anglaise s’était modifié dans la même proportion : de 2 shillings elle était tombée aux environs d’un shilling, c’est-à-dire 1 fr. 25 centimes. Les hommes d’État britanniques voulurent mettre un terme à ces variations aussi brusques qu’étendues, qui causaient de grands préjudices au commerce anglais, à l’agriculture indigène, au Trésor indien surtout. Ils commencèrent par suspendre la libre frappe de l’argent, ce qui eut pour effet de relever la valeur de la roupie, puisqu’une monnaie, comme toute autre marchandise, est d’autant plus chère qu’elle est offerte en moindre quantité ; afin de l’empêcher de dépasser le niveau auquel ils entendaient la fixer désormais et qui était la valeur de 16 pence de monnaie anglaise (1 fr.65 environ), ils accordèrent au Gouvernement le droit, qui était retiré aux particuliers, de