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taux d’intérêt sur les places américaines accusant une progression inquiétante, le secrétaire du Trésor décida « de faire chaque semaine à partir du 23 août des dépôts substantiels dans les différentes parties de la Confédération, avec l’intention spéciale de faciliter le mouvement d’automne des récoltes. » En dépit de ces nouvelles remises, qui atteignirent 26 millions de dollars, l’argent était de plus en plus rare et de plus en plus cher. La Trésorerie redoubla d’efforts pour conjurer la crise : en quatre jours, elle transféra aux banques 35 millions ; elle se contenta, pour garantie de ces dépôts, de titres d’Etats particuliers, de municipes et de chemins de fer, au lieu des obligations fédérales qu’exigeait la loi. Le Ji novembre 1907, les créances du Trésor atteignaient 226 millions, et, le 27 décembre, 260 millions, maximum de l’année. Un mois plus tard, le chiffre était ramené à 226 millions. L’orage était passé, et la Trésorerie voyait refluer dans ses caisses une partie des sommes qu’elle avait répandues dans le pays. Beaucoup de ses correspondans n’attendaient même pas qu’elle leur adressât une demande pour. restituer tout ou partie des fonds qui leur avaient été confiés. A la fin de juin 1908, l’ensemble des dépôts publics était de 149 millions, chiffre dépassant à peine la moitié de celui qui avait été atteint au plus fort de la crise.

Parmi les opérations mémorables accomplies à l’étranger par la Trésorerie des Etats-Unis, on peut citer le versement effectué au printemps de 1904 pour l’achat du canal de Panama : elle paya alors 10 millions de dollars à la République de Panama et 40 à l’ancienne Compagnie. Cette dernière somme (plus de 200 millions de francs) fut transférée en Europe sans qu’une seule pièce de monnaie fût exportée : des viremens de banque suffirent, et le marché monétaire ne ressentit pas la moindre secousse. Deux ans plus tard, en 1906, les réserves des banques se trouvant très entamées, la Trésorerie leur avait remis des fonds, sous la condition qu’elles feraient venir de l’or de l’étranger : grâce à cette combinaison, une importation de plus de 50 millions de dollars de métal jaune ramena l’aisance sur les grandes places financières de la Confédération.

Ces diverses opérations donnent une idée de l’ampleur des moyens d’action du Trésor américain. C’est une puissance monétaire, dont les moyens d’action s’accroissent lorsque les budgets se soldent en excédent et diminuent dans le cas contraire.