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chaque année par les bureaux de recrutement. Mais une sélection physique sévère, les droits spéciaux d’une élite intellectuelle, trop peu nombreuse encore en Bulgarie, enfin des considérations d’ordre financier ont abaissé longtemps ce chiffre jusqu’à 17 000 hommes.

Depuis 1903, on l’a relevé progressivement à 26 000, d’après la croissance continue des budgets, de la natalité, surtout d’après celle des besoins. Le cadre s’élargissait à mesure. Aux six divisions d’infanterie existantes, celles de Sofia, Philippopoli, Sliven, Choumla, Roustchouk, Vratsa, celles de Doubnitsa, de Stara Zagora, de Plevna, vinrent s’ajouter. On adjoignit encore à chacune d’elles le cadre d’une brigade de réserve ; il y avait là comme l’amorce d’une deuxième division, et comme une pierre d’attente sur laquelle on pensait construire un jour tout un corps d’armée. La guerre étant survenue avant que ce programme à longue échéance ait pu être réalisé, la question se pose de savoir si, lors de leurs prochains accroissemens militaires, les Bulgares se conformeront encore au plan organique de 1903 ou s’ils considéreront au contraire le type de la division à trois brigades comme consacré par leurs derniers succès.

Quoi qu’il en soit, neuf de ces belles unités, à 24 000 baïonnettes, et 1 000 hommes d’artillerie, portent aujourd’hui à 225 000 hommes le noyau de leur armée en guerre. Grossie de ses troupes spéciales et des quelques formations complémentaires, elle s’élève à 234 000 hommes, auxquels il faut ajouter encore, pour mesurer au juste l’effort bulgare : 13 500 volontaires, 75 000 recrues des classes 1912 et 1913, 36 000 réservistes dans les dépôts, 48 000 miliciens de troupes d’étapes ; soit un total de 400 000 hommes. C’est un effectif double de celui que la France, dix fois supérieure cependant en population, présenta sur les Vosges et sur le Rhin au début de la guerre de 1870. Et l’amertume de cette comparaison est pour nous plus grande, elle est plus curative et plus salutaire, si nous n’oublions pas que, huit mois plus tard, en mars 1871, nous acceptâmes une paix douloureuse, ayant alors sous les armes plus d’un million d’hommes mal encadrés et mal instruits.

Il est remarquable encore que la masse bulgare mobilisée puisse reposer sur une base du temps de paix huit fois moindre numériquement. L’effectif de l’armée active n’est en effet que de 55 500 hommes (deux classes de 26 000 hommes et 3 500 officiers) ;