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actuelle. L’appui moral de ce grand pays ne nous a pas fait défaut quand nous en avons eu besoin et on a certainement prévu le cas où, si un conflit continental venait à éclater, cet appui moral pourrait devenir un appui matériel. Mais si des vues ont été échangées à ce sujet, aucune obligation d’y donner suite n’a été contractée ; on a laissé aux circonstances le soin d’en décider. Il en serait autrement avec un traité.

Faut-il donc le faire ? Ce n’est pas la presse française qui le demande, c’est la presse conservatrice anglaise, et elle le fait dans des termes qui ne peuvent que nous toucher. Il y aurait quelque légèreté à y répondre dès aujourd’hui, puisqu’on reconnaît en Angleterre même qu’une alliance comporte des conditions qui n’existent pas encore : toutefois, l’opinion française ne saurait en repousser l’idée a priori. Nous n’avons eu qu’à nous louer de la parfaite loyauté de l’Angleterre depuis que les arrangemens que nous avons faits avec elle en 1904 ont orienté nos deux politiques dans le même sens ; il n’y a pour ainsi dire pas un seul nuage entre nous, et notre confiance mutuelle a toujours été en se consolidant. L’alliance, si elle se concluait un jour, serait donc le contraire d’une génération spontanée ; elle aurait des racines dans un passé déjà long, elle serait le fruit de l’expérience. Nous n’en dirons rien de plus pour le moment. L’idée en est née chez nos voisins, c’est chez eux qu’elle doit faire son chemin et elle n’y a encore conquis, en dehors du gouvernement, qu’une partie de l’opinion. Mais c’est beaucoup qu’elle s’y soit produite, qu’elle y ait été exprimée e discutée. C’est le symptôme d’un esprit nouveau.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

FRANCIS CHARMES.