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poudre et les traverses construits, les crêtes des glacis des forts palissadées, leurs portes et leurs passages blindés, les magasins bondés de vivres et de poudres, les inondations préparées. Tout cela n’était pas achevé, mais partout on était en bon train.

Il était impossible de faire plus en moins de temps et de déployer une activité plus intense.

Duvernois, dans son journal, ne s’en indignait pas moins contre notre inactivité et nous reprochait les proclamations écrites à la demande de l’Impératrice, pour réchauffer le cœur de l’armée, comme si nous n’avions fait que des proclamations : « Au Ministère, nous ne demandons qu’une chose, nous lui demandons de nous laisser tranquilles, d’en finir avec les proclamations effarées et avec les délibérations qui n’aboutissent à rien. Nous n’avons pas besoin de rhétorique, nous avons besoin d’actes et de fusils. Il aurait peut-être déjà dû partir ; mais puisqu’il tient à rester, que du moins il nous laisse tranquilles au bord de l’abime où son imprévoyance nous a conduits. »

Il nous reprochait plus encore nos soupçons contre la Gauche. Quel esprit de défiance et de malveillance ! « On va même jusqu’à dire, s’écriait-il, qu’ils (les députés de la Gauche) voudraient exploiter nos malheurs au profit d’un parti. C’est une calomnie. Nous n’en savons rien, mais nous l’affirmons. Le seul acte de la Gauche a été jusqu’ici de demander des armes pour Paris, comme nous l’avons fait nous-même hier avant la Gauche. Cela prouve que la Gauche a son parti arrêté ; elle ne sera ni une entrave, ni un dissolvant, elle sera un stimulant. C’est son rôle historique et ce sera son honneur. » Il renchérit même sur les propositions désorganisatrices de l’Opposition : il a l’idée extraordinaire de supprimer la police au moment où sa vigilance est plus que jamais indispensable : « Il y a quatre mille sergens de ville à Paris, tous anciens militaires. Ce n’est pas assez pour contenir une population soulevée. C’est infiniment trop pour garder une ville qui saura bien maintenir l’ordre. Que le maintien de l’ordre soit confié à la garde nationale et à des constables volontaires. On pourra disposer immédiatement de quatre mille hommes aguerris et bien armés. Avis au ministère de la Guerre. »