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éviter les marais des Béni Ahsen qui rendent la rive gauche impraticable et que notre colonne volante a eu tant de peine à traverser entre la Kasba Knitra et Lalla Ito. La route desservait ensuite la ville de Sala pour se terminer au poste d’Ad Mercurios, qui marquait vers le Sud le point extrême de la pénétration romaine.

La route de l’intérieur, longue de 148 milles (219 kilomètres), se détachait de la précédente à 26 kilomètres au Sud de Tanger, à la station dite Ad Mercuri (Dchar Djedid, où l’on voit encore un certain nombre de vestiges romains). Par le poste d’Ad Novas (Sidi et Yemeni), elle atteignait l’oued Loukkos à Oppidum Novum, la ville actuelle d’El Ksar, desservait les stations non identifiées encore de Tremulæ, Vopisciana, Gilda, la source sulfureuse d’Aquæ Dacicæ (Aïn et Kibrit), traversait le Sebou dans la partie supérieure de son cours et, par la ville de Volubilis, la clef de la défense du Djebel Zerhoun et le centre de la romanisation dans le Maroc central, atteignait le point terminus de Tocolosida. — Cette route, qui était la grande artère intérieure du Maroc, correspondait dans son ensemble à la piste actuelle de Fez et Meknès à Tanger par le col de Zegotta, les pentes occidentales du Djebel Tselfat, les défilés de l’oued Mda, les points d’El Ksar et de Dchar Djedid. Même tracé, mêmes stations, même importance militaire et économique. Seul le point terminus s’est déplacé. Les villes romaines de Volubilis et Tocolosida ont fait place à deux nouvelles venues, les villes arabes de Fez et de Meknès, les deux grandes capitales du Maroc septentrional.

La province était assez pauvrement dotée au point de vue routier, surtout si on la compare à ses voisines du bassin méditerranéen. Les routes y étaient peu nombreuses et, de plus, fort médiocrement établies. Ce n’étaient pas ces magnifiques voies militaires, soigneusement dallées, régulièrement jalonnées de bornes milliaires, méticuleusement entretenues, qui font encore l’admiration du touriste en Italie, en Espagne, dans le reste de l’Afrique du Nord. Les routes de Tingitane étaient de simples pistes analogues aux pistes marocaines d’aujourd’hui, de tracé variable, ravinées par les pluies d’hiver, disloquées par les chaleurs de l’été et constamment modifiées par les caprices du trafic. Seuls les ponts, jetés sur le cours torrentueux des oueds, marquaient d’une manière permanente le passage