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paroi occidentale, les bois de Sarrebrück, de Stiring, de Forbach ; au milieu de ces bois, le village de Schœneck ; à 3 kilomètres en arrière Forbach, couvert à l’Est par la hauteur du Kaninchensberg. Les hauteurs derrière lesquelles coule la Sarre, se nomment le Champ de manœuvres, la Reppertsberg-, la Winterberg, etc. Elles sont dominées par le plateau de Spicheren. Sur ce terrain l’armée du Rhin va livrer sa première bataille.

A chaque instant, la rencontre décisive approchait ; on entendait presque de nos bivouacs découragés le galop des chevaux prussiens et le bruit de leurs canons, de tous côtés les avertissemens précis se multipliaient, et nous ne pouvions nous résoudre à rien ; on tâtonnait lourdement comme si l’on avait devant soi les jours et dans les mains la maîtrise des événemens. Ne sachant ni peser les renseignemens ni les contrôler, on les accueillait tous sans distinction ; on n’osait aller au-devant des Prussiens et on les attendait de tant de côtés à la fois, qu’on ne se préparait sérieusement nulle part à les recevoir.

C’est là la malédiction de la défensive. Dès qu’on attaque, on ne se soucie que médiocrement de ce que fait l’adversaire, on va de l’avant. Au contraire, lorsqu’on est sur la défensive, on est dans des transes perpétuelles parce qu’on est suspendu aux mouvemens de l’ennemi, sur lequel on n’a que des renseignemens vagues ou contradictoires. A tout instant, sur une dépêche, on conçoit un plan, on l’abandonne sur une autre, et l’on ne fait rien à propos.

Cependant, voulant se donner l’air de faire quelque chose, l’état-major commanda un nouveau mouvement. Le 5 août, dans la matinée, Bazaine transporte son quartier général de Boulay à Saint-Avold, où se trouvent déjà la division de cavalerie et les réserves d’artillerie. La division Decaen ly rejoint ; la division Castagny se dirige vers Puttelange, la division Metman sur Marienthal, et la division Montaudon sur Sarreguemines. Les divisions de Bazaine, qui s’échelonnaient les unes derrière les autres et pouvaient facilement se concentrer sur leurs têtes, s’éparpillent latéralement et seront plus difficiles à réunir. Frossard fut maintenu en avant-garde sur les hauteurs de la rive gauche de la Sarre, en attendant qu’on lui donnât un rôle dans le plan stratégique en perpétuelle élaboration. La Garde se transporta de Volmerange à Courcelles-Chaussy. Canrobert reçut l’ordre d’envoyer trois divisions d’infanterie de Châlons à Nancy par