Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 8.djvu/359

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

devait y attendre un vaisseau de guerre qu’au moment où il quittait Naples, le ministre Acton avait promis de lui envoyer et qui devait le transporter à Trieste. Mais, à la même heure, dans la capitale napolitaine, la marine royale se trouvait subitement désemparée et immobilisée dans le port, par suite de la désertion d’une partie des équipages que la peur de l’invasion française faisait fuir de tous côtés. Le marquis de Gallo attendit en vain pendant une semaine le bâtiment qui lui avait été annoncé. Il se décida alors à partir par ses propres moyens et à se mettre en route à tous risques. Le 9 février, après un long séjour à Brindisi, il débarquait à Trieste, et le 15, il était à Vienne.

Dans la pensée de l’Autriche, la paix de Campo-Formio, à laquelle elle avait dû se résigner, n’était qu’une trêve à la faveur de laquelle elle parviendrait à renouer la coalition des puissances contre l’ennemi commun. C’était aussi la pensée de l’Angleterre. Elle n’avait pas approuvé les concessions faites au Directoire par le gouvernement impérial et, bien qu’elle ne dût pas prendre part au congrès de Rastadt qui allait s’ouvrir et fixer les possessions et les limites de l’Empire allemand, elle s’était flattée d’y exercer son influence à l’effet de provoquer une rupture qui remettrait en question les engagemens des uns et des autres. L’avortement de cette réunion diplomatique ne devait que trop favoriser ses desseins et encourager ses espérances. Le Piémont, Rome, les Pays-Bas, la Suisse, le royaume de Naples étant envahis par les Français ou à la veille de l’être, elle en avait profité pour entreprendre des démarches à Vienne, à Saint-Pétersbourg, à Berlin, à Naples, voire à Constantinople et partout où elle espérait être écoutée. Au moment où le marquis de Gallo arrivait dans la capitale autrichienne, ces démarches couronnées de succès commençaient à porter leurs fruits.

Si d’une part le roi de Prusse, le roi d’Espagne et le jeune roi de Suède Gustave IV, en paix avec la République, refusaient énergiquement de prendre les armes, d’autre part, l’empereur de Russie Paul Ier signait avec les Anglais un traité par lequel il s’engageait à envoyer en Suisse et en Italie 45 000 hommes formant deux armées dont l’une de 16 000 serait spécialement affectée à la défense des Etats napolitains. Disons en passant, pour ne pas y revenir, que celle-ci ne reçut pas l’emploi