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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Les événemens parlementaires sont, depuis quelques jours, d’une importance immédiate assez médiocre, mais ils nous préparent pour l’avenir de sérieuses difficultés. Le Sénat, qui poursuit à la hâte la discussion du budget de 1912, a décidément incorporé dans la loi de finances une nouvelle loi sur les retraites ouvrières, et la Chambre, aux prises avec la réforme électorale, avance lentement au milieu de broussailles qu’elle accumule elle-même très consciemment devant ses pas. La nouvelle loi des retraites coûtera cher, dans un moment où notre situation financière aurait besoin d’être particulièrement ménagée. Quant à la réforme électorale, c’est la toile de Pénélope : la Chambre défait un jour ce qu’elle a fait la veille, après quoi, elle se repose de cet effort pendant plusieurs semaines. A marcher de ce train, on n’est pas près d’atteindre le but : les puissances de temporisation, ou plutôt d’obstruction, l’emportent de plus en plus.

Ce n’est pas la première fois que le Sénat sacrifie son opinion aux obligations qu’il croit résulter pour lui des circonstances. Après avoir voté autrefois le rachat de l’Ouest pour ne pas renverser le Cabinet Clemenceau, il est de sa part plus excusable de voter la nouvelle loi sur les retraites ouvrières pour ne pas ébranler le Cabinet Poincaré. Ce Cabinet jouit de la faveur publique ; aussi est-on disposé à lui faire de larges concessions ; mais il faut reconnaître que celles que le Sénat vient de lui faire ont été dures. On sait de quel discrédit la loi de 1910, sur les retraites ouvrières a été frappée dès le premier moment ; elle a suscité, dans le monde ouvrier, une méfiance qui est fort loin d’être dissipée ; la résistance a continué jusqu’ici et elle a été si générale que les partisans de la loi n’ont vu d’autre moyen de la faire accepter que de la changer. Elle a