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se classe plus qu’au 5e rang, bien loin de l’Angleterre, de l’Allemagne et même des Etats-Unis, après la marine norvégienne ; et l’Italie la serre de près. Cependant aucun de nos rivaux heureux ne réserve à ses nationaux le monopole des professions maritimes. Ce n’est donc pas ce qui fait la prospérité d’une marine. M. d’Agoult estime que nous devons à cette obligation, résultant du décret-loi de 1793 (acte de navigation), une majoration de 12 pour 100 dans les frais relatifs à nos équipages. Et il ne tient pas compte du faible rendement du travail, résultat du monopole ; sur un même bateau, acheté à l’étranger, où trois hommes suffisaient à la manœuvre, il nous en faut quatre.

L’Inscription maritime, en partie responsable déjà de la complication en vertu de laquelle six ou sept ministères interviennent dans les affaires maritimes, fait donc aussi peser sur l’armement des charges directes dont nous avons vu l’origine : versemens à la Caisse de prévoyance, au début 1 1/2 pour 100 des salaires, depuis 1905, 3 1/2 ; contribution à la caisse des Invalides, portée en 1908 à 3 pour 100 des salaires ; obligation, à défaut de conventions spéciales, de donner aux marins une nourriture équivalente à celle des matelots de l’État ; obligation de soigner, nourrir et rapatrier les marins tombés malades et de leur verser leur solde pendant quatre mois après leur débarquement.

Cette dernière clause a été exploitée par les ayans droit, et des statistiques montrent qu’un tiers des équipages se faisaient allouer des Si)ins médicaux et les avantages y attachés. Enfin, la loi du 17 avril 1907 sur la sécurité de la navigation et la réglementation du travail à bord, conçue dans l’intérêt souvent mal compris des inscrits, surcharge encore le commerce français. Elle lui coûtera plusieurs millions par an.

Ce ne serait rien encore s’il n’y avait pas les grèves. Considérables sont les pertes directes : la Chambre de commerce d’Alger vient, pour ce qui la concerne, de faire paraître la statistique des deux mouvemens de 1904 et 1909 : cela se chiffre par millions. La seule Compagnie transatlantique, au mois de juin 1909, a vu le nombre de ses passagers sur Alger diminuer de 222 en première classe ; 434 en deuxième ; 464 en troisième : 541 en quatrième ; les marchandises de 4 842 tonnes, plus 26 000 moutons, d’où perte sèche d’environ 150 000 francs. Mais