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sont capables d’y entrer, en s’appliquant à révéler à l’un et à l’autre ce qu’il peut faire, à quelles conditions, avec quelle dose de confiance et avec quelle surveillance sur soi-même il le fera. N’oublions pas cette méthode toute française ; nous aurons bientôt à y revenir en étudiant les moyens de sortir de l’anarchie dont nous souffrons.

En attendant, tenons pour acquis que ce qui importe ici, ce n’est pas le programme, mais la méthode. La distinction est bien connue, elle mérite qu’on y insiste, car elle est de nature à éclairer d’une très vive lumière les difficultés où nous nous débattons. Un vaste programme peut être enseigné aux jeunes gens avec une méthode qui en limite la portée utile jusqu’à la réduire à zéro : un programme très simple peut être enseigné avec une méthode qui en étendra la portée on peut presque dire indéfiniment. Mais la méthode, tout en comportant des règles générales, a toujours quelque chose de personnel et quelque chose de libre. Or, s’attendre à ce que l’administration centralisée d’un personnel répandu dans quatre-vingt-neuf départemens insiste sur la liberté de maîtres ayant amplement fait leurs preuves, ce serait de la naïveté. Qu’il est tentant, d’autre part, de confier à une commission le soin de rédiger des programmes ! Si les premiers n’ont pas donné les résultats attendus, on en trouve d’autres, on en trouvera tant qu’on voudra ! L’arsenal des connaissances humaines est inépuisable, il n’y a qu’à tendre la main pour la retirer toute pleine. On aura toujours des savans prompts à céder à cette illusion de leur amour-propre, qu’il faut bien se garder de laisser ignorer longtemps à la jeunesse tout ce qu’ils out découvert. Quand il s’agit cependant des découvertes des autres, ils s’empressent d’avouer que ce qu’il importe le plus de communiquer aux enfans, c’est la curiosité, c’est le goût de la recherche, c’est l’effort suivi, c’est l’attention éveillée, c’est l’art de tirer l’inconnu du connu ; ne craignons pas d’ajouter : c’est l’amour d’une science enseignée par un professeur qui s’intéresse à ses élèves. Nous verrons dans un instant si on a, nous ne disons pas facilité, mais permis cette dernière condition. Ce qui est certain, c’est qu’on ne parle jamais que des changemens de programmes, de la séparation ou de l’unification des programmes, de l’accord ou du désaccord entre les programmes des lycées et le programme des grandes écoles. J’ai retrouvé les traces de cette manie