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L’ANARCHIE SCOLAIRE

Le mot d’anarchie qu’on vient de lire en tête de cette étude est-il excessif ? Ce mot désigne habituellement un état de choses où il n’y a pour personne ni direction, ni sécurité, où chacun est censé pouvoir faire tout ce qu’il veut et où nul ne voit quel fruit il est assuré de retirer de ses tentatives : donc tout le monde marche à l’aventure et se décourage ; chacun se défie de son voisin : il n’y a que les amateurs de choses louches qui aient lieu d’éprouver quelque satisfaction.

Notre état scolaire offre-t-il l’exemple d’un pareil désordre ? Beaucoup le pensent, et ce jugement ne date pas d’hier. Consultons l’enquête de 1899, non pour abriter paresseusement nos opinions derrière celles d’autrui, mais pour reconstituer une suite historique et pour comparer à ce qui était demandé ce qui a été fait. Voici comment parlait M. Lavisse : « Nous sommes affligés dans l’Université d’un faux parlementarisme : ni autorité d’une part, ni liberté d’autre part ; c’est un régime tout à fait singulier, bâtard, et qui suffirait à lui seul pour créer le malaise dont nous souffrons. » Sans même avoir eu le temps de lire dans la sténographie la déposition de son collègue, M. Alfred Croiset se plaignait, lui aussi, qu’il n’y eût plus dans les lycées et les collèges ni autorité, ni direction ; et il ajoutait : « Il me semble aussi, chose qui paraît contradictoire et qui ne l’est pas du tout, qu’il y a un manque de liberté, d’initiative. Cela m’a été dit de tous les côtés. » Impossible d’avoir un avis plus net, émané de plus hautes autorités.

Quelques lecteurs bien au courant des antécédens m’arrêteront peut-être ici : « Il ne s’agissait là sans doute,