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M. de Freycinet lui-même, au moment où il consentait à entrer avec de pleins pouvoirs au ministère de la Guerre.

Quelques troupes battues à Artenay et à Orléans s’étaient réfugiées en Sologne. La Loire était découverte et vingt mille hommes à peine erraient dans cette région sans commandement effectif et sans but. Dans l’Est, les soldats de Cambriels, victimes également de la défaite, s’étaient réunis sous les murs de Besançon. Dans l’Ouest, on avait quelques embryons de bataillon de mobiles, et dans le Nord, sauf les places, on ne pouvait compter que sur de médiocres renforts. En envoyant la Délégation à Tours, le gouvernement de la Défense nationale croyait si bien que le noyau de la résistance serait uniquement Paris, que les directions du ministère de la Guerre étaient restées pour la plus grande partie dans la capitale.

Devant un tel désarroi et un tel abandon, il fallait aviser au plus pressé.

Constituer des bureaux militaires compétens, ainsi que des bureaux de renseignemens et de reconnaissances, accroître le nombre des unités combattantes, compléter les régimens placés derrière la Loire, former deux nouveaux corps d’armée, les 15e et 16e corps à Blois, se procurer l’armement et l’outillage nécessaires, combler toutes les lacunes, préparer au plus vite, et sans perdre une minute, les approvisionnemens nécessaires en vivres et en munitions, profiter de toutes les bonnes volontés et de tous les efforts pour arriver au but commun : la destruction de l’ennemi et par là même la libération des territoires, telle fut la pensée constante de la Délégation et particulièrement celle du ministère de la Guerre.

De son côté, Gambetta va nous faire connaître l’état de la province à son arrivée.

« Quand je m’installai à Tours, dit-il à ceux qui l’interrogèrent le 7 septembre 1871, à l’Assemblée Nationale, je trouvai le pays dans un véritable état de sécession. Il y avait au Midi, au Sud-Ouest, dans l’Ouest des tendances alarmantes pour l’unité de la France. En même temps, l’action du gouvernement était très faible. Il était peu obéi… J’entrai dans la Délégation de Tours avec la résolution de rétablir l’ordre compromis sur beaucoup de points du territoire. Je fus assez heureux, dans un espace de temps fort restreint, pour pouvoir remettre l’ordre partout… Une fois l’unité rétablie, ma préoccupation fut