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Bismarck, la responsabilité du Culturkampf, n’avait, d’après Arnim, qu’à causer avec eux directement : et des concessions aux sujets auraient quelque chose de plus fier, de plus franc, de plus digne d’un Hohenzollern, que des marchandages avec Rome.

Bismarck laissait dire ; il laissait la caricature le représenter casque en tête, avec l’air d’un pompier anglais, patinant sur la glace avec le Saint-Père ; et persistant dans sa politique, il écrivait une longue épître au cardinal Nina, pour redire qu’il ne fallait pas exiger de mutuelles concessions de principes, mais nouer une bonne fois des rapports, et que les obstacles, ensuite, diminueraient d’eux-mêmes


V

Bismarck, en cette fin d’été, fiévreusement courbé sur les statistiques du nouveau Reichstag, cherchait une majorité. Il avait en vue plusieurs besognes ; pour toutes, l’appui des conservateurs lui paraissait certain. Mais les conservateurs, à eux seuls, ne formaient pas une majorité : il lui fallait un appoint. Son premier soin, le plus urgent de tous, était de présenter un nouveau projet de loi contre les socialistes ; il demeurait inquiet du succès. Car, à cet égard, l’opposition du Centre était inflexible. Windthorst, très sincèrement, ne voulait aucunes lois d’exception, ni contre les rouges, ni contre les noirs ; et si tous les membres du nouveau Reichstag gardaient, à l’égard du socialisme, l’attitude qu’ils avaient eue en mai, Bismarck, une fois encore, courait vers un échec. La seule résipiscence qu’il pût espérer était celle des nationaux-libéraux : s’il parvenait à gagner leur appui, le projet de loi passait. Falk, au début de septembre, voyant à Gastein le chancelier, le trouvait incroyablement excité contre les nationaux-libéraux. Une histoire de complot s’était échafaudée dans son imagination. Il les accusait d’avoir voulu le renverser ; il accumulait les faits, multipliait les preuves ; la brouille, cette fois, semblait consommée. Il est des rayons de soleil qui semblent présager le beau temps et, derrière eux, amènent la pluie ; les éclats de colère de Bismarck étaient, en sens inverse, aussi fallacieux. On attendait une tempête, et c’était une bonace qui se préparait. Bismarck, en quittant Falk, le priait d’aller causer de sa part avec Bennigsen. La subtile et curieuse étude que l’on