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LE CRIME DE LORD BYRON[1]


I

Une des tâches que s’est données le XIXe sièclee siècle (et, sur ce point, le XXe paraît destiné à aller encore plus loin) a été de substituer, dans la littérature et dans l’art, à la critique directe des œuvres, d’après certains principes d’esthétique absolue, que les modernes avaient hérités d’Aristote et de Longin, l’étude psychologique des auteurs et du milieu où ils ont vécu, de la société qui les a inspirés et sur laquelle, à leur tour, ils ont agi. Pour cette nouvelle critique, — aujourd’hui seule maîtresse du terrain, — tout roman a une clef, tout poème est une confession. Rien ne caractérise mieux ces tendances que le désappointement furieux quelle éprouve en présence d’une personnalité qui se dérobe à ses investigations. Par exemple, lorsqu’elle veut soumettre Shakspeare à ses procédés de juge d’instruction, que trouve-t-elle ? Des extraits de registres baptismaux ou mortuaires, des contrats d’achat et de vente, une ligne dans l’armorial d’Angleterre et un testament qui ressemble au testament de tous les bourgeois de 1610. À côté de ces maigres documens, quelques légendes, plus ou moins apocryphes, et les Sonnets qui pourraient bien, après tout, n’être que des exercices

  1. Principaux ouvrages à consulter : Life of Lord Byron, par Thomas Moore. — Works edited by E. H. Coleridge, 7 vol. 1904. — Letters & Joumals of Lord Byron, edited by R. E. Prothero, 1901. — Comtesse Guiccioli, Byron jugé par les témoins de sa vie, 1868. — Harriet Beecher Stowe, The true history of Lady Byron. — Lady Byron vindicated, 1870. — Autobiography of Medora Leigh. — Lord Lovelace, Aslarte, 1905. — Richard Edgcumbe, Byron, the last phase, 1909, — Francis Gribble, The love affairs of Lord Byron, 1910.