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disparus, vraies merveilles de goût par l’harmonie des proportions, la somptuosité noble et discrète. Le confortable seul y manquait, mais les propriétaires ne s’en souciaient guère : « Mes enfans étaient très haut et pas trop bien logés, » dit Croy.

Qu’importent ces détails à des courtisans, heureux de se replier en des mansardes, s’ils « accrochaient du Roi » ce qu’ils appelaient un « appartement au château de Versailles. » Cette désignation pompeuse signifiait, pour les plus huppés, quelques chambres minables qu’ils faisaient peindre et dorer à leurs frais. — Le Roi donnait seulement les lieux clos et couverts. — Quelques frais qu’ils eussent faits, leur jouissance, était précaire, malgré les « bons du Roi » et les « assurances » toujours révocables, s’il plaisait à Sa Majesté de changer quelque aménagement dans son palais. Aussi ces « privilégiés » tremblent-ils de perdre le gîte exigu, souvent malsain et humide, mais qui « fait tout mon bonheur, » dit l’un d’eux, parce qu’il resserre et maintient le contact avec le maître. Un besoin nouveau, né au XVIIIe siècle, fut celui des citadins aisés de posséder une villa, une « guinguette » avec jardins extra muros. Vers la fin du règne de Louis XIV les rives de la Seine, à 1 500 mètres de Paris, étaient encore solitaires ; on s’y trouvait comme dans un désert. Cinquante ans plus tard les bords du fleuve, presque jusqu’à Marly, étaient garnis de plantations et de maisons élégantes.

Il se fit alors à Paris des appartenons de location, — spéculation nouvelle, — assez grands pour offrir une douzaine de pièces de plain-pied, « la plupart parquetées. » Les parquets étaient l’objet d’une mention spéciale, comme les glaces et les cheminées de marbre, parce que le type ordinaire de maison neuve ne comportait encore que des logis carrelés et, sur l’âtre des cheminées, des tablettes de bois. La distribution intérieure demeurait assez barbare ; les occupans s’en accommodaient : une famille demande, par la voie des journaux (1762), un logement qui ne dépasse pas 6 300 francs et spécifie qu’il devra se composer d’une « antichambre qui puisse servir de salle à manger, d’une salle de compagnie, chambre à coucher, etc. »