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obstacle à ce qu’un juif habitât cette maison : sur le mur on voyait une antique Madone peinte à fresque, et les mœurs du temps n’autorisaient point, pour la sainte Vierge, une telle promiscuité. Aussi notre homme, prudent et subtil, avait-il pris ses précautions : il avait demandé à l’évêque la permission, moyennant finance, de faire enlever la Madone, ce qui était sage, mais ayant payé, il se croyait à l’abri de tout péril, ce qui n’était pas. Voici qu’un beau jour de mai, la veille de l’Ascension, une procession passant devant sa maison, avisa, sur le mur, à la place de la Madone accoutumée, des images peu édifiantes et une inscription des plus profanes que des gens malintentionnés venaient d’y charbonner. On ne douta pas que ce ne fût le fait du juif. « Sacrilège ! sacrilège !…  » On entend, d’ici, tout ce que la foule put dire. La procession s’arrêta, et une grêle de pierres s’abattit sur les fenêtres du banquier. On put craindre, un moment, que la maison ne fût mise à sac par la multitude des fidèles animés d’une généreuse envie de venger leur Madone et peut-être aussi du désir d’éloigner un