L’idéal pacifiste du Premier australien, qui ne veut voir dans l’Empire britannique que la préface des Etats-Unis du monde, est trop en dehors de la politique pratique pour représenter les vues de la généralité des impérialistes modérés d’Angleterre ou des colonies, d’hommes comme M. Asquith et ses collègues ou comme M. Laurier. Quel avenir conçoivent donc ceux-ci pour l’Empire britannique et, puisqu’ils rejettent la fédération, qu’entendent-ils faire à la place ?
Peu de choses par eux-mêmes, ou du moins pas de choses trop ambitieuses, ils n’hésitent pas à l’avouer. Laisser agir le temps, qui est un grand maître, et avant tout « ne pas perdre de vue la valeur de l’élasticité et de la flexibilité dans notre organisation impériale, ni l’importance qu’il y a à maintenir pleinement chez chacun de nous la responsabilité ministérielle devant le Parlement. » C’est ainsi que s’exprimait M. Asquith dans son discours d’ouverture, que le très impérialiste Times jugeait « bon et clair, mais peu calculé pour inspirer l’enthousiasme dans l’auditoire plus vaste, auquel il aurait dû se souvenir qu’il parlait par-dessus la tête de ses auditeurs immédiats. » Ce qui est essentiel aux yeux des libéraux et des radicaux actuellement au pouvoir en Grande-Bretagne, comme à ceux de la plupart des ministres coloniaux qui assistaient à la conférence, c’est de ne pas se jeter imprudemment dans des projets d’union trop étroite et trop rigide, qui risqueraient d’aller contre leur but parce qu’ils seraient interprétés dans les diverses parties de l’Empire comme diminuant l’autonomie locale, et que, d’ailleurs, il est bien difficile de soutenir qu’ils ne la diminueraient pas en effet.
Avant de s’unir par des liens trop serrés, ne faut-il pas d’abord se bien connaître ? La grande utilité des conférences impériales, c’est précisément qu’elles établissent le contact entre les représentans les plus qualifiés des parties les plus distantes de l’Empire, M. Fisher, sir Wilfrid Laurier, sir Joseph Ward lui-même l’ont proclamé à plusieurs reprises et le 20 juin dernier, M. Asquith y insiste dans son discours de clôture :
Si je devais définir quel a été le trait dominant de cette Conférence, je dirais que c’est l’effort pour arriver à une coopération plus étroite par le vieux système britannique de libre et franche discussion. Vous tomberez d’accord avec moi, messieurs, que la valeur de cette Conférence ne doit pas être jugée entièrement par les résolutions fermes qu’elle a prises et