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« La fin loue la vie, et le soir le jour… » M. Romain Rolland citait ce vieux proverbe en 1906, quand il publiait aux Cahiers de la Quinzaine le premier fascicule de La Révolte, qui achève la première partie de son Jean-Christophe, Maintenant, il vient de donner le dixième et dernier volume de son ouvrage : la fin loue la Aie ; l’ouvrage est beau.

Si l’on n’aime pas également ces dix volumes et si l’on n’en goûte pas tout le détail ; si Ion n’en voit pas très bien l’économie et si parfois, au cours de ces trois mille pages, on a cru sentir un peu de lassitude lorsque aussi peut-être, avant de se relever magnifiquement, la volonté de l’écrivain subissait une défaillance ; et même si l’on n’est pas certain que la pensée de Jean-Christophe ait exigé cette continuité d’une fiction qui dure si longtemps, il faut qu’on admire la dignité d’un si grand effort, sa lente réussite. Ne méconnaissons pas les grâces d’une certaine frivolité. Mais un écrivain qui s’enferme dans une méditation de dix années, qui obéit à son vœu claustral, qui résiste à l’inévitable doute, qui s’entête et lutte contre soi aux mauvais jours, un tel écrivain qui a fait durement son métier d’artiste mérite l’honneur après la peine. Il a bien servi son austère idéal.

Jean-Christophe est, dit l’auteur, « la tragédie d’une génération qui

  1. Romain Rolland, la Nouvelle journée, dernier volume de Jean-Christophe. Et Jean-Christophe se compose de dix volumes, répartis en trois séries : 1. « Jean-Christophe : » l’Aube (1904), le Malin (1904), l’Adolescent (1905), la Révolte (1906-1907) ; II. « Jean-Christophe à Paris : » La foire sur la place (1900), Antoinette (1908), Dans la maison (1909) : III. « La fin du voyage : » Les Amies (1910), le Buisson ardent (1911), et la Nouvelle journée (1912).