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l’Espagne. Il était clairon effet que l’Allemagne multiplierait ses efforts en sens contraire et que, pour affaiblir la France, elle chercherait à l’isoler.

La plupart des hommes d’Etat espagnols se montraient, comme le Roi lui-même, résolus à ne pas se prêter à ce jeu. Comme le Roi, ils estimaient que les accords franco-espagnols, utiles en eux-mêmes, faisaient partie d’un ensemble qu’il importait de sauvegarder. Ce n’est pas à la France seule que l’Espagne était liée par ces accords : c’était aussi à l’Angleterre, puisque le traité franco-anglais du 8 avril 1904 avait explicitement prévu les arrangemens franco-espagnols et que ces arrangemens eux-mêmes avaient été connus et approuvés par le Cabinet britannique. Les ententes occidentales étant ainsi devenues la base de sa politique, l’Espagne devait naturellement accepter les charges qui y étaient attachées. Du point de vue marocain, elle n’avait d’ailleurs rien à regretter. Elle avait rempli point par point le programme de M. Silvela, et ce programme était celui de la sagesse. M. Moret, président du Conseil, le duc d’Almodovar, ministre des Affaires étrangères, M. de Léon y Castillo, ambassadeur à Paris, étaient acquis à une politique de stricte fidélité. Mais cette politique trouvait, à Madrid même, des contradicteurs. Beaucoup savaient mauvais gré à la France d’avoir posé la question du Maroc et, en la posant, de l’avoir précisée. Car préciser, c’est limiter. Nul doute que ces mécontens ne fussent accessibles aux suggestions allemandes. Obsédés de la perspective de bénéfices impartagés, ils étaient prêts à ouvrir l’oreille à toutes les tentations. Or le tentateur n’était pas loin qui devait les conduire sur la montagne et leur offrir d’un geste tout l’Empire chérifien. Il nous fallait compter avec cet état d’esprit.

L’accord secret du 1er septembre 1905 eut pour objet de nous prémunir contre lui et de sceller plus fortement, en vue de la lutte diplomatique qui commençait, la solidarité franco-espagnole. L’article 4 de cet accord portail : « L’Espagne étant fermement décidée à marcher complètement d’accord avec la France, au cours des délibérations de la conférence projetée, et la France se proposant d’agir de même avec l’Espagne, il demeure convenu entre les deux gouvernemens qu’ils s’aideront mutuellement et procéderont d’un commun accord dans lesdites délibérations, en ce qui concerne les stipulai ions de la convention