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moment de cette liquidation que les cotes sont le plus déprimées, parce que c’est alors que les besoins de l’État sont le plus considérables. En outre, les belligérans ne seront pas seuls à recourir au crédit. D’autres opérations d’emprunt sont en perspective, du côté de l’Autriche-Hongrie, de l’Espagne, de la Chine. La France, une fois de plus, devra suivre une politique financière avisée et mûrement étudier les conditions auxquelles elle souscrira aux émissions projetées. Pendant que les armées sont en campagne, on a recours aux expédiens : on place des Bons du Trésor à échéance plus ou moins rapprochée, les moins sages émettent des billets de banque à cours forcé. Une fois la paix conclue, il faut rembourser tout cela : on est en face de budgets grossis, de besoins d’achat et de réfection de matériel ; les dépenses militaires s’accroissent presque toujours au lendemain de la lutte. Un exemple comme celui des Japonais qui, après le traité de Portsmouth, ont eu la sagesse de réduire les crédits militaires de 200 millions (budget de 1907-1908) a 188 millions de yen (budget de 1912-1913), est presque unique dans l’histoire moderne.

La marche des fonds publics des belligérans est en général la suivante. Lorsque les hostilités éclatent, la baisse est plus accentuée sur les rentes de l’adversaire que la Bourse juge le plus faible. En février 1904, les fonds japonais avaient subi d’abord une chute profonde, tandis que les rentes russes fléchissaient à peine. Le sort des batailles décide ensuite de celui des cours : c’est ainsi que les étapes victorieuses des armées bulgare, serbe et grecque ont été marquées par un relèvement des rentes de ces trois nations. Les fonds ottomans, surtout le 4 pour 100 unifié, administré par le Conseil de la Dette, ont été plus stables, parce que les porteurs estiment que, quoi qu’il arrive, les revenus donnés en gage continueront à être affectés à la sûreté de leur créance. Certaines émissions, considérées comme moins bien gagées, ont été plus atteintes. Lorsque l’heure du règlement final aura sonné, il est probable que des emprunts seront contractés à des cours inférieurs, sinon aux niveaux actuels, du moins aux cours les plus élevés cotés durant la guerre. C’est ainsi que la France, en 1871 et 1872, dut vendre des rentes 5 pour 100 à un prix que lui imposait une charge effective de 6 pour 100, et que la Russie, en 1906, émit un 5 pour 100 à 88, c’est-à-dire presque au même taux que